Journée mondiale des sols. Hommage à nos amis du sous-sol

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Hommage à nos amis du sous-sol

Temps de lecture estimé: 6 minutes
©FIDA/Francesco Cabras

Avez-vous déjà vu un étourneau sautiller sur le sol? Si c’est le cas, vous l’avez probablement vu s’arrêter soudainement, incliner sa tête et écouter, avant de creuser le sol pour en tirer un ver de terre frétillant dans son bec. L’étourneau entend des choses que nous n’entendons pas, ce qui explique en partie pourquoi nous passons à côté de mondes comme celui du ver de terre. Nous ne remarquons pas ce que nous ne voyons pas ou n’entendons pas, et souvent nous ne nous en soucions même pas: loin des yeux, loin du cœur. Ce n’est qu’au cours des vingt dernières années que nous avons commencé à étudier et à comprendre les fonctions et les liens complexes de ces écosystèmes, notamment l’écosystème des sols, et leur importance dans notre quotidien.

Alors plongeons-nous dans ce monde fascinant des vers de terre, acariens, champignons et microbes.

Les sols constituent le revêtement extérieur de notre planète. Leur texture caractéristique tient aux différentes particules minérales qui les composent, comme le sable, le limon et l’argile, dont la taille et les proportions varient selon les lieux. Ils contiennent en outre des matières organiques – organismes vivants ou morts – en quantités variables et à différents stades de décomposition. Un échantillon de sol se compose en moyenne d’environ 50% de minéraux et de 5% de matière organique en poids, le reste étant constitué d’eau et d’air. La couche arable, soit les 5 à 20 premiers centimètres, est la plus productive. Un gramme de sol peut renfermer un milliard de cellules bactériennes, des centaines de mètres d’hyphes fongiques (les filaments qui relient les organismes fongiques) et des milliers d’espèces différentes, qui constituent ensemble les organismes des sols.

Les sols sont la base de l’agriculture. Ils contiennent un réseau alimentaire complexe fondé sur la décomposition et le cycle des nutriments, et notamment sur plusieurs processus physiologiques essentiels tels que les cycles du carbone et de l’azote. En agriculture, il est essentiel que cette matière morte et en décomposition soit réutilisée afin que les nutriments servent à de nouvelles cultures. La biodiversité du sol est un facteur déterminant de la disponibilité des nutriments pour les cultures, qu’ils soient stockés sous terre ou bien restitués pour donner naissance à de nouvelles pousses. Parallèlement, la structure physique du sol, étayée par une intense activité biologique avec beaucoup de matière organique et une importante couverture végétale, lui permet de filtrer et de retenir l’eau, rendant ainsi un service essentiel aux exploitants agricoles dans les régions chaudes et sèches. Certains micro-organismes du sol dégradent les polluants, et certains peuvent même transformer les métaux lourds, ce qui sert à assainir les sols contaminés. (Pour mieux comprendre la biodiversité des sols et ses fonctions, voir l’Atlas mondial de la biodiversité des sols.)

Dans plusieurs de ses projets, le FIDA applique des pratiques visant à accroître la fertilité des sols, à renforcer leur structure physique et à préserver leur biodiversité. Nombre de ces pratiques sont fondées sur les principes agroécologiques de diversification des systèmes de production, comme l’association des productions animales et végétales, la combinaison d’une grande variété de cultures pérennes et annuelles, l’augmentation de la couverture des sols et le développement de synergies entre les différentes composantes des champs, des exploitations ou de l’environnement général. Ces pratiques permettent d’utiliser plus efficacement les ressources en recyclant les déchets agricoles et en complétant les cycles des nutriments.

Dans une prochaine publication consacrée aux solutions fondées sur la nature, le FIDA présente une étude de cas intrigante en République démocratique populaire lao, où des exploitants agricoles utilisent une méthode particulière de fabrication de compost. Ils mélangent des résidus agricoles avec du sucre et de la mélasse, puis conservent la préparation jusqu’à ce qu’elle se transforme en un compost riche en nutriments et en microbes qui, selon les habitants, contribue à augmenter la production de légumes et à réduire les parasites. Le fonctionnement exact de cette méthode est encore mal compris, mais il mérite d’être étudié. De telles méthodes locales pourraient conduire à l’adoption de pratiques agricoles plus durables et plus productives partout dans le monde.

Dans le cadre de ses projets, le FIDA mène en outre d’autres mesures pour améliorer et préserver la biodiversité des sols, dont voici quelques exemples:

  • L’agroforesterie et les pratiques garantissant une couverture constante des sols, comme les paillis et les cultures de couverture. Ces pratiques préviennent l’érosion des sols, limitent la croissance des mauvaises herbes et accroissent la proportion de matière organique, augmentant ainsi la capacité de rétention d’eau du sol.
  • L’application d’engrais organiques, tels que le compost, le fumier et les résidus de culture.
  • La promotion du recyclage des éléments nutritifs, en favorisant l’adoption de pratiques telles que la rotation des cultures, la culture combinée de plantes pérennes et annuelles, et le sous-semis, ou en privilégiant la diversité des cultures. Les espèces légumineuses telles que le niébé, l’arachide et le trèfle contribuent particulièrement à l’équilibre en azote des sols et à l’apport d’azote à d’autres plantes, et sont souvent elles-mêmes des sources de fourrage nutritif.
  • Des techniques de labour minimum et de labour zéro, combinées à l’utilisation de cultures de couverture pour éviter la croissance des mauvaises herbes. Cette approche limite les perturbations dans les différentes couches du sol et permet de préserver leurs caractéristiques et fonctions spécifiques, ainsi que le réseau mycorhizien, qui joue un rôle important dans le transfert d’eau, de carbone, d’azote et d’autres nutriments et minéraux entre les plantes.
  • La lutte intégrée contre les parasites, qui comprend un large éventail de mesures relatives aux cultures, aux moyens physiques (filets, pièges, paillis) et aux processus biologiques (en favorisant, par exemple, les ennemis naturels des parasites). Ces pratiques permettent de limiter considérablement le recours aux produits agrochimiques, qui ne sont utilisés qu’en dernier recours.

Ces méthodes, qui font partie d’approches systémiques et intégrées, seront présentées en plus amples détails dans une prochaine étude du FIDA sur l’agroécologie appliquée aux systèmes agricoles et alimentaires des petits producteurs dans le cadre des projets du Fonds. Pour mieux faire connaître son action en faveur de la promotion et de la préservation de la biodiversité, aussi bien à la surface que dans les sols, le FIDA élabore actuellement une stratégie et un plan d’action en faveur de la biodiversité. Ce plan guidera notre approche en matière de biodiversité et définira les occasions à saisir pour inciter les petits producteurs et les communautés rurales à adopter des méthodes propices à la préservation de la biodiversité, à la production durable d’une variété d’aliments sains et à la création de revenus.

La biodiversité des sols est un domaine encore mal connu, tant sur le plan spatial que taxonomique. Il n’existe pas de liste rouge des micro-organismes menacés, et il est peu probable qu’il y en ait une à l’avenir. Les plus petites créatures, celles que nous ne voyons pas à l’œil nu, ne peuvent être identifiées qu’en laboratoire. Si nous manquons encore d’informations sur l’activité souterraine et la diversité des organismes que renferme le sol, nous en savons suffisamment pour prendre pleinement conscience de leur importance fondamentale pour la vie. Nous devons les préserver. Nous savons que les sols ne se composent pas uniquement de minéraux. Ses éléments les plus essentiels sont en fait les débris biologiques, à tous les stades de la décomposition et du renouvellement, et la myriade d’organismes qui s’y trouvent.

Il est essentiel de prêter attention à ces organismes invisibles, sans cesse actifs, et à leur écosystème, non seulement en cette journée, mais tous les jours.


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