Des solutions qui n’oublient pas les femmes avec les retours en zones rurales liés à la COVID-19

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Des solutions qui n’oublient pas les femmes avec les retours en zones rurales liés à la COVID-19

Temps de lecture estimé: 6 minutes
©FIDA/Cristóbal Corral

Les migrations internes (migrations à l’intérieur d’un pays) ont d’importantes conséquences sur les collectivités et les individus sur les plans démographiques, sociaux, culturels et économiques. En temps normal, les flux migratoires sont généralement dirigés des zones rurales vers les espaces urbains, où les nouveaux arrivés viennent chercher du travail. Toutefois, la pandémie de COVID-19 a créé une nouvelle vague migratoire en sens opposé: les habitants des villes se réinstallent en milieu rural. Dès la mi-2020, au Pérou, par exemple, à peine quelques mois après le début de la pandémie, 167 000 personnes avaient abandonné la capitale pour retourner dans les régions rurales. Plusieurs autres pays d’Amérique centrale ont enregistré des mouvements similaires, les travailleurs nationaux rentrant dans leur collectivité rurale d’origine, en particulier durant les premiers mois de 2020. Ces exemples traduisent sans doute la réalité de nombreux autres pays d’Amérique latine.

Beaucoup de ces migrants ont été contraints de se réinstaller en milieu rural après avoir perdu leur emploi et, avec lui, leur capacité à supporter les coûts plus élevés de la vie urbaine. Si certains ont ensuite retrouvé le chemin de la ville, d’autres ont choisi de rester à la campagne dans l’espoir d’y gagner leur vie

Or les migrations ont des effets particulièrement marqués dans le secteur agricole, il est donc important que le FIDA et d’autres organismes trouvent des solutions pour relever les défis, présents ou à venir, liés à ce nouveau phénomène qui pèsera sur le développement agricole des zones rurales. Du point de vue de l’équité femmes-hommes, c’est même un point crucial.

 

Zoom sur les femmes rurales dans le secteur agricole

Dans ce genre de situation, il faut être plus particulièrement attentif aux difficultés que rencontrent les femmes – en particulier les femmes rurales. Il y a plusieurs raisons à cela. Premièrement, la pandémie et ses conséquences diverses ont touché de manière disproportionnée les femmes par rapport aux hommes. Deuxièmement, les femmes rurales jouent un rôle charnière dans la production, la transformation et la commercialisation des denrées alimentaires et des autres produits agricoles cultivés par leur collectivité. Or, elles se heurtent à de nombreux obstacles pour accéder aux ressources productives et aux technologies, ainsi qu’aux services financiers, tels que les prêts.

De pareilles circonstances soulignent l’urgence de mettre en place des programmes d’inclusion économique. Si nous n’orientons pas nos programmes dans cette direction, tous les graves problèmes sociaux qui touchent ces femmes et leur famille risquent de s’installer. Par exemple, à défaut d’inclusion économique, les femmes rurales pourraient se retrouver tributaires d’autres membres du ménage, une situation qui exacerberait les inégalités de genre, ce qui a souvent d’autres conséquences, comme la violence sexiste.

Inclusion économique et protection sociale: deux réponses efficaces

Par conséquent, le FIDA et d’autres organismes doivent axer leurs travaux sur la promotion de l’inclusion économique des femmes, tout en assurant simultanément leur protection sociale. Une large palette de mesures peut être envisagée. Pensons par exemple à l’application et au renforcement de la conditionnalité des programmes d’assistance agricole (les programmes doivent remplir certaines conditions pour prétendre à une aide financière), au renforcement de l’appui aux investissements en faveur du développement agricole et des petites entreprises agricoles, et à l’optimisation des mécanismes axés sur le marché du travail, grâce à des mesures simples comme la création d’agences pour l’emploi dans les zones rurales. Ce type de mesures est préconisé par des organisations telles que l’Organisation de coopération et de développement économiques. Cette approche s’inscrit aussi dans le droit fil d’instruments tels que la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants et le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières.

De plus, nous devons analyser les synergies potentielles entre les programmes de protection sociale et les programmes d’inclusion économique, en vue de les mettre au service des femmes de retour dans les zones rurales.

Les travaux de recherche conduits grâce à un don accordé au projet Sinergias Rurales (un projet en faveur des synergies en milieu rural financé par le FIDA et exécuté par l’Université des Andes) ont par exemple démontré l’important rôle que jouent ces synergies dans le développement rural. Notons que des synergies ont été mises en évidence à plusieurs stades du processus d’exécution: pendant l’octroi du crédit aux populations rurales, lors des initiatives de renforcement des capacités et au cours des activités de développement des compétences non techniques. Ce constat, de même que d’autres conclusions de la recherche, a permis d’éclairer les décisions de politique générale de sept pays en Afrique et dans la région Amérique latine et Caraïbes, ainsi que celles prises par des institutions financières désireuses d’instaurer une coordination efficace entre les programmes.

En Amérique latine, ces conclusions sont corroborées par les résultats obtenus précédemment dans le cadre du Programa Proyectos Productivos (Programme de projets productifs) en Colombie, où les activités d’inclusion économique et de protection sociale ont été menées de manière synchrone. Les synergies développées entre ces initiatives ont généré de nombreux effets positifs, notamment dans les domaines suivants: sécurité alimentaire, capital social, perception subjective par les ménages de leur propre bien-être et, surtout, avancement des ménages dirigés par une femme. Dans les ménages participants, on a observé une amélioration notable de l’équité femmes-hommes au sein du cercle familial, en particulier dans la perception du travail domestique. En outre, on note une augmentation de 20% de l’accès des hommes et des femmes aux services financiers formels, ce qui a réduit de 30% le recours à des prêts informels.

Selon d’autres études menées en Colombie, au Mexique et au Pérou, la mise en place en tandem de programmes d’inclusion économique et de protection sociale produit des résultats positifs, en particulier pour les groupes vulnérables, dont les femmes. La conception de projets coordonnés avec des programmes existants de ce type pourrait donc nous aider à toucher davantage de femmes en situation de vulnérabilité, comme les femmes rurales migrantes.

Perspectives d’avenir: s’adapter à la COVID-19 et à d’autres circonstances

L’intégration des programmes de protection sociale et d’inclusion économique est un outil efficace pour réduire les inégalités femmes-hommes et promouvoir l’avancement et l’inclusion économique des femmes. À mesure que nous élargissons ces programmes, en particulier dans la région Amérique latine et Caraïbes, nous devons accorder une attention particulière aux femmes qui ont été contraintes de retourner dans les zones rurales en raison de la pandémie de COVID-19 et qui se trouvent donc en situation de vulnérabilité. Il convient, par conséquent, d’envisager les synergies possibles entre ces initiatives dès la conception de nos propres projets. Nous devrions également veiller à ce qu’ils intègrent les nouveaux besoins résultant de la pandémie, en tenant compte par exemple des nouvelles dynamiques migratoires.

Le FIDA œuvre avec détermination pour épauler toutes les femmes rurales, notamment celles en période de transition. Ainsi, dans l’ensemble du portefeuille de la Douzième reconstitution des ressources du FIDA, nous continuerons de promouvoir le renforcement de la résilience des populations, en recourant à des outils tels que les services financiers inclusifs en milieu rural, la création de savoirs et l’intégration des questions de genre. Soucieux de ne laisser personne de côté, nous ne cesserons de nous adapter aux besoins nouveaux découlant de la crise de la COVID-19 et d’autres événements imprévus.