Il était une fois deux villages au Tadjikistan

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Il était une fois deux villages au Tadjikistan

Ou comment l’irrigation peut faire toute la différence

Temps de lecture estimé: 5 minutes

Au Tadjikistan, dans la région aride du sud-ouest du pays, se trouve les ruines des murs en terre de Kuhdomani bolo. Ce village était autrefois luxuriant et verdoyant mais en raison de la défaillance des systèmes d’irrigation, les champs et les pâturages se sont asséchés. Faute de pouvoir vivre de leurs terres, les villageois sont partis un à un. Aujourd’hui Kuhdomani bolo est abandonné.

Mais un peu après ces champs sans vie, on trouve un autre village, qui a connu un tout autre destin. Il s’agit du village de Kuhdoman, aussi vert et luxuriant que Kuhdomani bolo est terne et stérile.

Terne et sans vie, Kuhdomani bolo est un village fantôme dont les maisons tombent en ruines. ©FIDA/Didor Sadulloev

Quand le photographe du FIDA sort son appareil, Ahmet Bekmato fait de grands gestes. « Prenez tout ce vert en photo parce que tout cela a poussé grâce à l’eau d’irrigation », dit-il.

En regardant son lopin de terre, il est difficile de croire qu’il y a encore seulement deux ans, celui-ci était vide. Aujourd’hui le blé grandit et les plants de melon donnent des fruits. Surtout, grâce aux 0,3 hectare qu'il cultive, Ahmet gagne suffisamment pour subvenir à ses besoins, et à ceux de sa femme et de leurs quatre enfants.

À Kuhdoman comme à Kuhdomani bolo, les conduites installées et les canaux créés durant l’ère soviétique constituaient une source d’eau essentielle dans cette région aride. Mais dans les dernières décennies, faute de ressources financières et dans un contexte de conflit acharné, ce système d’acheminement de l’eau a été laissé à l’abandon. Le sol est devenu poussière et les arbres fruitiers ont séché.

L’eau est acheminée par des conduites et déversée dans des canaux d’irrigation, permettant aux habitants de cultiver leurs champs. ©CASP-PMU

Situé en altitude, Kuhdoman était particulièrement vulnérable face à la sécheresse. À partir de 2008, le village s’est asséché et même l’eau à usage domestique a dû être acheminée par camion. Chaque famille pouvait dépenser jusqu’à 3 000 somoni (soit environ 300 USD) par an rien que pour son eau potable, l’équivalent de deux mois de salaire pour un ménage moyen.

Au fil des ans, sur les 300 familles que comptait Kuhdoman, 50 avaient quitté le village et ce n’était qu’une question de temps avant que ce dernier soit vidé de sa population.

Mais en janvier 2020, le Projet communautaire d’appui au secteur agricole (également désigné par son acronyme en anglais, CASP) a ramené l’eau à Kuhdoman. Des conduites ont été installées, acheminant l’eau des rivières alimentées par la fonte des neiges dans l’est du pays, et, pour la première fois depuis plus d’une décennie, les villageois n’ont plus eu à verser des sommes importantes pour s’approvisionner en eau à usage domestique. Ils disposaient de suffisamment d’eau pour l’assainissement et le bétail. De plus, ils pouvaient désormais cultiver leurs lopins de terre et ressusciter leurs cultures.

Achaldiev Hasan, le Président de l’organisation des habitants de Kuhdoman, devant un champ de blé ©CASP-PMU

L’eau de retour, Ahmet peut faire prospérer son lopin de terre. Il cultive du blé et du handalak, une sorte de melon. Il vend ses fruits et récolte le blé qu’il utilise pour cuisiner et nourrir son bétail.

L’année dernière, son bénéfice a été de 31 600 somoni (soit environ 3 100 USD). Grâce à ses revenus, ainsi qu’à l’argent qu’il consacrait auparavant à l’achat d’eau et qu’il a pu économiser, il construit une nouvelle maison. Ahmet investit dans l’avenir: grâce au système d'acheminement de l’eau, lui et sa famille sont bien décidés à rester.

Des handalaks, une variété de melon locale, poussent dans un champ irrigué ©FIDA/Didor Sadulloev

Ahmet et tous ses voisins ne perdent jamais Kuhdomani bolo de vue. Le village est visible au loin, juste derrière leurs champs, et ses maisons en ruines leur rappellent le sort qui les attend s’ils n’investissent pas en faveur de la durabilité.

« Kuhdoman aurait connu un sort similaire si le projet n’avait pas amené l’eau jusqu’à notre village », explique Achaldiev Hasan, le Président de l’association des habitants. « Eux aussi avaient un système de pompage et des canaux autrefois, et leurs maisons étaient magnifiques. Mais sans eau, les habitants ont perdu espoir et ont fini par partir ».

Cependant, à Kuhdoman, l’avenir semble sourire à la population. Des familles sont venues se réinstaller dans le village et, tout comme Ahmet Bekmatov, beaucoup investissent et reconstruisent leur maison. Comme le dit Achaldiev: « Le projet a ramené l’eau, l’espoir et le bonheur dans notre communauté. Désormais, nous pouvons envisager notre avenir ici ».

En savoir plus sur les activités du FIDA en faveur de l’eau et de l’irrigation.