À l’occasion de la COP15 contre la désertification, voici trois façons dont le FIDA aide les agriculteurs d'Afrique subsaharienne à renforcer leur résilience aux changements climatiques

IFAD Asset Request Portlet

Agrégateur de contenus

À l’occasion de la COP15 contre la désertification, voici trois façons dont le FIDA aide les agriculteurs d'Afrique subsaharienne à renforcer leur résilience aux changements climatiques

Temps de lecture estimé: 7 minutes

Les zones arides de l'Afrique subsaharienne, c'est-à-dire les zones où les pertes d'eau par évaporation sont supérieures aux précipitations, sont confrontées à un phénomène généralisé de dégradation des terres. De nombreux facteurs en sont la cause, mais l'un des plus importants est le recours à des pratiques agricoles inadaptées à la santé des sols, comme le surpâturage et l'agriculture intensive, des techniques qui maximisent la productivité et les rendements, souvent au point de perturber l’équilibre des ressources naturelles.

Malheureusement, les gains tirés de ces pratiques ne se font ressentir qu’à très court terme. Les ressources naturelles dégradées réduisent la production des exploitations, et font peser sur les petits exploitants le risque de ne pas pouvoir fournir des aliments nutritifs à leurs familles et de perdre leurs moyens d’existence. La récente modification des régimes pluviométriques due aux changements climatiques aggrave le phénomène de sécheresse, entraînant ainsi une accélération des processus de dégradation.

Depuis 2017, le FIDA dirige le Programme pour des systèmes alimentaires résilients (RFS), une initiative mise en œuvre dans 12 pays d’Afrique subsaharienne pour encourager la gestion durable des ressources naturelles et transformer les systèmes alimentaires locaux. Il s’agit de l’un des programmes pilotes pour une approche intégrée financés par le Fonds pour l'environnement mondial (FEM) pour lutter contre la dégradation de l’environnement.

Cet article illustre trois projets RFS financés par le FIDA ayant introduit des solutions innovantes pour aider les communautés à protéger leurs zones arides, préserver leur sécurité alimentaire et se préparer aux effets des changements climatiques à venir.

En Eswatini, les femmes commencent à faire entendre leur voix

Eswatini: les femmes prennent leur place à la table

L’agriculture est le fondement de l’économie d’Eswatini, mais elle est de plus en plus difficile à pratiquer. Le surpâturage et la déforestation, entre autres pratiques agricoles inadaptées, favorisent l’érosion des sols, privant la population des bienfaits de la nature tels que l’eau salubre et les terres fertiles.

Mais si une grande partie de la population swazie a de bonnes idées pour lutter contre ces problèmes, certaines ont du mal à se faire entendre. Les femmes sont en effet généralement écartées des processus décisionnels. Elles vont jusqu’à refuser les postes à responsabilités auxquels elles sont élues, à cause de normes sociales qui accordent plus de valeur au leadership masculin (malgré des études prouvant que la participation des femmes à la gestion communautaire des ressources naturelles sur un pied d’égalité avec les hommes conduit à une meilleure remise en état des terres, fait reculer le phénomène de désertification et améliore les conditions socioéconomiques).

Aujourd’hui, le projet RFS Eswatini produit des changements positifs. Cette initiative,  récemment saluée par un prix, crée des zones protégées pour donner à la vie sauvage un espace où s’épanouir, introduit la production d’aliments diversifiés et accompagne l’installation de systèmes d’irrigation à énergie solaire sur des terres autrefois dégradées.

Par ailleurs, le projet bouscule aussi les normes sociales en cherchant à garantir la pleine participation des femmes aux actions de protection de l’environnement et d’amélioration des moyens d’existence, et œuvre auprès des administrations locales pour reconnaître la participation des femmes dans le secteur agricole. Et les femmes parviennent enfin à prendre leur place: aujourd’hui, un quart des femmes travaillant dans les institutions communautaires en assurent la présidence. Les femmes mettent en culture des parcelles de démonstration et initient leurs pairs (hommes et femmes) à la gestion durable des terres.

Niger: la gestion des ressources naturelles au service de la sécurité nutritionnelle

La pratique de l’agriculture s’avère aussi de plus en plus difficile dans le grenier du Niger. Dans ces zones arides du Sahel, les agriculteurs voient reculer la surface de leurs terres autrefois fertiles à cause de l’érosion, de la déforestation et d’une moindre disponibilité en eau.

Aujourd’hui, le projet RFS Niger aide les exploitations familiales à préserver cet environnement fragile. Il encourage les bonnes pratiques qui aident les petits exploitants à économiser de l’eau et restaurer les terres dégradées.

En 2021, près de 74 000 agriculteurs nigériens avaient été formés aux pratiques de gestion durable des terres, y compris un retour aux pratiques traditionnelles, comme la plantation d’arbres et d’arbustes dans les zaï, des fosses remplies de fumier destinées à amender le sol. Les petits exploitants ont ainsi pu restaurer près de 30 000 hectares de terres dégradées, et ont participé à la régénération naturelle assistée de 188 000 hectares supplémentaires – soit la superficie de Maurice.

Plus la terre est en bonne santé, plus la population l’est aussi. Près des deux tiers des participants au projet ont déclaré avoir noté une baisse considérable de la malnutrition au sein de leur ménage, due en partie aux nouvelles techniques de préparation des aliments proposées par le projet.

Une pépinière d’avocatiers, au nord de Nairobi. Les avocatiers sont une solution idéale pour lutter contre l’érosion des sols, et leurs fruits rapportent beaucoup aux agriculteurs locaux. © Laura MacInnis (FEM)

Kenya: quand le secteur privé est là

La quasi-totalité de l’eau utilisée par les 4 millions d’habitants de la capitale du Kenya, Nairobi, provient du fleuve Tana. Le bassin versant du fleuve s’est transformé au fil des ans, passant de forêts sauvages à champs cultivés dont dépendent des dizaines de milliers de petits exploitants. Mais les pratiques agricoles de ces derniers sont rarement viables, entraînant une hausse de l’érosion des sols, une baisse de la productivité des terres et une réduction drastique de la quantité et de la qualité de l’eau, désormais moins disponible pour la consommation et l’utilisation industrielle en aval.

Le projet RFS Kenya, dirigé par le FIDA et mis en œuvre par The Nature Conservancy, a introduit des investisseurs du secteur privé en aval, tels que Coca-Cola et East African Breweries. Cela permetde financer le travail de milliers de petits exploitants en amont destiné à restaurer les terres dégradées, collecter de l’eau, améliorer les conditions pédologiques et cultiver des plantes moins gourmandes en eau.

Grâce aux plus de 20 millions d’USD de financements et au 1,6 million d’USD de cofinancements provenant de partenaires du secteur privé, le projet a permis aux petits exploitants du bassin versant du Haut Tana de restaurer près de 73 000 hectares de terres. Ensemble, ils ont planté 3,4 millions de jeunes plants et installé près de 14 500 cuves récupérant chaque année près de 2 millions de mètres cubes d’eau destinés à l’irrigation.

Aujourd’hui, le projet s’est transformé en ONG indépendante connue sous le nom de  Upper Tana Nairobi Water Fund (fonds pour l’eau dans le Haut Tana-Nairobi), dont l’existence prouve que le secteur privé peut être mobilisé pour aider les populations rurales les plus pauvres. Le monde entier gagne à assurer la prospérité des petits exploitants.

Investir dans l’avenir

La COP15 (la 15e réunion de l’organisme des Nations Unies consacré à la lutte contre la désertification) émet en ce moment même un appel mondial en faveur de la gestion durable des terres, en particulier dans les zones arides. Il s’agit d’une façon de reconnaître que la dégradation des terres engendre un cercle vicieux de pauvreté, de faim, de pollution et d’augmentation des risques de catastrophes naturelles, accroissant ainsi la vulnérabilité des communautés.

Comme le montrent ces projets, les approches intégrées à la gestion durable des terres sont la solution pour favoriser la résilience des moyens d’existence et des systèmes alimentaires, même dans le contexte des changements climatiques.

En savoir plus sur l’action du FIDA pour des systèmes alimentaires résilients.