Comment changer une vie: un projet d’accompagnement des ménages dans le nord de l'Ouganda

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Comment changer une vie: un projet d’accompagnement des ménages dans le nord de l'Ouganda

Temps de lecture estimé: 6 minutes

On dit qu’on ne naît pas leader, mais qu'on le devient. Dans le cas de Molly Ajok, cela ne fait aucun doute. Originaire du nord de l’Ouganda, elle est en charge, à 33 ans, d’accompagner des ménages. 

Molly est née à Agwari, un village reculé du district d’Omoro. Alors qu’elle n’était qu’une enfant, sa famille a fui à Gulu afin d’échapper à la guerre civile qui faisait rage dans la région. C’est là qu’elle a passé la plus grande partie de sa vie.

Mais en 2017, elle a traversé une période difficile. Sans travail ni espoir de terminer sa formation, Molly peinait à subvenir à ses besoins et à ceux de son jeune enfant. C’est alors qu’elle a pris la décision difficile de rejoindre ses parents à Agwari.

« Cela n’a pas été facile », se souvient-elle. « J’étais amère et ne voyais aucun avenir pour mon enfant et moi. »

Comme elle était la deuxième d’une fratrie de 10 enfants, elle savait qu’il était attendu d’elle qu’elle contribue aux revenus du foyer. Alors, elle a trouvé un travail.

« Au début, je vendais des crêpes pour boucler les fins de mois », explique-t-elle. « Je gagnais environ 750 USD par an, soit juste assez pour payer les frais de scolarité de mon enfant et contribuer aux dépenses de la famille. »

Le moment décisif s’est produit lorsqu’elle a été sélectionnée par sa collectivité pour accompagner des ménages, dans le cadre du Projet de rétablissement des moyens de subsistance dans la région du Nord (PRELNOR) appuyé par le FIDA.

Ces programmes de mentorat, tels que celui mené à Agwari, aident les familles à améliorer leurs moyens d’existence en développant leur capacité d’établir des priorités et de planifier l’avenir. Les ménages participants appliquent les compétences acquises tout d’abord au sein de leur famille, puis au niveau de la collectivité, en prenant part à divers groupes et initiatives de développement. Les facilitateurs du programme et les mentors qui accompagnent les ménages sont issus de la communauté et prodiguent conseils et soutien à chaque étape. C’est dans ce cadre que Molly a appris à devenir une figure de référence pour les autres.

« Au début, les choses étaient compliquées, mais j’étais déterminée à réussir », confie-t-elle. « Je suis toujours galvanisée quand je vois les gens transformer leur vie. »

Le mentorat consiste à guider des familles en cinq phases. Chaque famille commence par analyser la situation dans son foyer. Puis elles définissent une direction commune à la famille pour l’avenir et dessinent leur cheminement vers la concrétisation d'une vision en représentant, sous la forme de dessins, les obstacles auxquels elles se heurtent et les mesures qu’elles prendront pour atteindre leurs objectifs. De là, elles élaborent un plan d’action et le mettent en œuvre. Les ménages qui vont au terme du programme reçoivent une aide à la sécurité alimentaire qui peut être utilisée pour stimuler leur production alimentaire actuelle (pour ceux qui ont déjà une activité agricole) ou lancer une petite affaire. Cette composante de « cheminement vers la concrétisation d'une vision » est en fait adaptée du Système d’apprentissage interactif entre les sexes, qui fait partie du portefeuille du FIDA sur les méthodes axées sur les ménages.

Molly s’arrête quelques instants sur le chemin qu’elle emprunte pour rejoindre un groupe de femmes qu’elle accompagne

Très vite, Molly a rencontré Margaret.

Margaret Ayoo, 53 ans, mère de cinq enfants, était en difficulté. Son mari l’avait quittée et son départ avait considérablement réduit les revenus de la famille. Elle travaillait comme journalière sur les exploitations d’autres personnes afin de nourrir sa famille, mais l’argent venait toujours à manquer. Lorsque Molly l’a rencontrée pour la première fois, après que la communauté l’avait renvoyée vers le programme, elle n’arrivait pas à se projeter dans l’avenir.

Depuis qu’elle a bénéficié de ce programme de mentorat, Margaret ne travaille plus sur les exploitations des autres mais sur ses propres terres, données par la collectivité. Ses récoltes sont suffisamment bonnes pour nourrir sa famille et elle vend le surplus sur le marché. Grâce à ses revenus, elle peut à nouveau régler les frais de scolarité de ses enfants.

De plus, elle est désormais estimée par les autres membres de la collectivité. Récemment, elle a été choisie pour devenir trésorière de l’association locale d’épargne et de prêt, expérience qu’elle n’aurait jamais imaginé vivre avant son mentorat.

Molly est extrêmement fière d’elle. « Je suis heureuse de voir à quel point elle et ses enfants se sont transformés », se réjouit-elle. « On a peine à croire qu’il s’agit de la même femme que celle que j’ai rencontrée il y a un an. »

Molly pense qu’un leader guide par l’exemple. Alors qu’elle commençait à engranger de l’expérience auprès d’autres ménages, elle a décidé d’explorer les dynamiques de sa propre famille, à l’aune des compétences qu’elle avait acquises.

Au début, les langues ont eu du mal à se délier sur certains sujets, en particulier son père, qui avait l’habitude de prendre toutes les décisions pour le foyer. Mais après avoir entamé une conversation sur la répartition des rôles entre femmes et hommes et évoqué des manières dont les tâches pourraient être redistribuées à la maison, sa famille a changé d’avis. Aujourd’hui, son père associe volontiers son épouse à la prise de décisions.

Molly a également défini son propre cheminement vers la concrétisation d'une vision ainsi que des objectifs. Elle s’efforce désormais de développer ses activités et d’accroître ses revenus. En plus de son travail de mentorat, elle a lancé un projet d’élevage de volailles et de porcs. Ses efforts paient déjà: en 2019, elle a augmenté ses revenus de 40%. Et elle continue de faire des crêpes qu’elle vend aux écoles voisines.

Après quatre années passées à accompagner des ménages, Molly, façonnée par ses expériences, est aujourd’hui un exemple pour les autres. À ce jour, elle a aidé plus de 40 familles. Sa réputation la précède: la collectivité parle d’elle en termes élogieux. Signe du crédit accordé à ses compétences, elle a récemment été nommée présidente du comité de protection de l’enfance de son village.

Comme de nombreuses autres personnes, elle a rencontré des difficultés financières en 2020. Les écoles étant fermées en raison de la pandémie, ses ventes de crêpes s’en sont ressenti. De plus, elle a perdu plusieurs de ses volailles à cause d’une maladie. Néanmoins, elle reste confiante en l’avenir.

« Je suis très reconnaissante envers la collectivité et le PRELNOR, qui m’ont donné la chance d’accompagner des ménages et d’aider des membres de ma collectivité », s’exclame-t-elle. « Ma vie a véritablement changé ! »

Poursuivant son parcours pour devenir une figure de référence dans son village, Molly est heureuse des expériences positives et enrichissantes qu’elle vit avec chaque ménage qu’elle suit.

 

Découvrez l’action du FIDA en Ouganda.