L’union fait la force pour les agroentreprises rurales de Bosnie-Herzégovine

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L’union fait la force pour les agroentreprises rurales de Bosnie-Herzégovine

Temps de lecture estimé: 5 minutes
©FIDA/Paolo Marchetti

Les économies rurales gagnent en dynamisme lorsque les exploitations et les petites entreprises travaillent en étroite collaboration, mettent en commun leurs ressources et défendent collectivement les questions qui leur tiennent à cœur. En Bosnie-Herzégovine, les petites exploitations familiales opèrent pourtant trop souvent en vase clos. Seules, elles manquent souvent des ressources, des connaissances ou des compétences qui leur serviraient pour prospérer.

Le FIDA rassemble les petits exploitants, les petites et moyennes entreprises (PME) et d’autres parties prenantes du secteur agricole en clusters (également appelés en français des grappes d’entreprises ou des pôles de compétitivité) pour les amener à travailler ensemble au service de leurs intérêts communs. Nous avons rencontré Violeta Lemic, spécialiste technique pour le FIDA, pour en savoir plus sur le fonctionnement et l’intérêt de telles structures.

Pour commence, c'est quoi un cluster?

Un cluster est un groupe d’entreprises qui se réunissent pour partager leurs ressources, mettre en œuvre des initiatives communes et plaider pour leurs intérêts collectifs. D’autres plateformes rassemblent les parties prenantes opérant à un point donné de la filière, par exemple les organisations de producteurs. Mais les clusters regroupent des membres qui interviennent à tous les niveaux de la filière.

Elles rassemblent les parties prenantes par zone géographique. Typiquement, un cluster réunira agriculteurs, coopératives, organisations de producteurs, fournisseurs d’intrants, acheteurs, agents financiers et techniques, autorités agricoles, universités et municipalités, situées dans une région donnée. Tous ces acteurs présentent des forces et ressources différentes, mais s’investissent en faveur d’une prospérité commune.

Lorsque l’équipe du projet RCDP a parlé de cette idée aux petits exploitants et autres parties prenantes de Bosnie-Herzégovine, ces derniers ont rapidement compris l’importance de ces clusters, qu’ils ont eux-mêmes mis en place et officialisés. Il s’agit d’une initiative qui vient du terrain.

Les clusters peuvent aussi aider les exploitants à s’organiser dans le cadre de coopératives. Ce point est particulièrement important en Bosnie-Herzégovine, où les petits exploitants travaillent souvent isolément. Cela a déjà conduit à la création de cinq coopératives agricoles, et permis la consolidation de 12 coopératives supplémentaires, qui forment au total un réseau de 700 agriculteurs.

Quel est le rôle de ces clusters?

La taille et le domaine de compétence des clusters varient considérablement, mais je vais vous donner un exemple pour illustrer leur fonctionnement.

Le cluster Gradiška Laktaši Srbac (GLS), dans le nord du pays, compte 12 membres: cinq PME, trois organisations de producteurs représentant de nombreux agriculteurs, une coopérative agricole (encore une fois, composée de plusieurs membres), et trois entreprises agricoles. Elle se réunit régulièrement pour prévoir et mettre en œuvre des initiatives conçues pour améliorer la compétitivité de ses membres.

Cette initiative tourne autour de la production de myrtilles, cultivées par une dizaine d’agriculteurs dans la région. Les membres du cluster ont mis leurs ressources en commun et contracté des services de conseil spécialisé pour les agriculteurs. Ils ont également pris leurs dispositions pour accéder à des intrants subventionnés, et lancé une campagne de promotion sous le slogan: « Moi, je mange des myrtilles fraîches et produites localement! » La demande est montée en flèche, et les myrtilles ont été vendues à très bon prix.

Plusieurs marques locales ont même vu le jour grâce à ces clusters. Les consommateurs des quatre coins du pays savent désormais que les tomates Slatina, les myrtilles Srbac ou encore les pommes de terre Nevesinje sont les marques à privilégier.

Quels avantages tirent les membres de ces clusters?

Grâce aux lusters, les petits exploitants et les PME peuvent faire des choses qu’ils ne pourraient faire seuls, par exemple négocier des remises sur les intrants, vendre leurs produits ou faire du lobbying auprès des décideurs politiques.

Par exemple, les entreprises agroalimentaires membres d’un cluster peuvent partager leur main-d’œuvre. Si elles étaient seules, elles n’auraient pas nécessairement la possibilité de proposer des emplois à plein temps. Ces emplois apportent par ailleurs une solution au chômage rural et aux flux migratoires, auxquels les municipalités ont du mal à faire face. Et les services de vulgarisation et universités locales bénéficient d’un secteur agricole en pleine croissance qui emploie leurs étudiants et favorise le dialogue politique en matière de recherche et d’innovation.

Les clusters sont aussi des plateformes de plaidoyer. Par exemple, pour bénéficier d’une subvention agricole de l’État, les parcelles de cornichons doivent occuper au moins 0,5 hectare, à l’instar des autres légumes. Un de ces clusters a démontré qu’aucune exploitation agricole ne consacrait plus de 0,2 hectare à la culture du cornichon. La taille minimale des parcelles a été modifiée, débloquant ainsi des subventions en faveur des petits producteurs de cornichons. Sans cluster, ceux-ci n’auraient pas nécessairement eu l’influence ou l’organisation nécessaires pour faire valoir cet argument.

Quels enseignements avez-vous tirés de la création de clusters en Bosnie-Herzégovine? Et quelle est la prochaine étape?

Les grappes ont besoin de subventions publiques pour démarrer, mais s’inscrivent surtout dans la durée lorsqu’elles sont créées en partant des besoins du terrain. Au début, nous avons organisé des ateliers participatifs pour convaincre les parties prenantes de former des clusters à l’aide de processus décisionnels démocratiques.

Il est difficile de les maintenir sur la durée, mais les clusters gérés par une personne rémunérée à plein temps obtiennent généralement de meilleurs résultats que eux gérés par des bénévoles. Nous leur suggérons donc d’exploiter certaines sources de revenus comme les cotisations, les dons, les fonds publics et les propositions de projets. 

Il existe, à l’heure actuelle, sept clusters à l’échelle du pays. La plus petite compte 8 membres, et la plus importante, 28, sachant qu’un « membre » peut être une PME ou une coopérative, qui peut elle-même introduire de nombreux agriculteurs dans le réseau. Nous présentons désormais les clusters comme des agences de développement régional, ce qui nous permet de mettre en relation des parties prenantes issues de filières différentes.

La création de clusters est une excellente façon d’organiser officiellement un secteur complexe comme l’agriculture, promouvoir le développement et accélérer le changement. Pour reprendre une expression populaire: l’union fait la force.

Découvrez l’action du FIDA en Bosnie-Herzégovine.