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Projet de Développement Rural de l'ORD de l'Est

28 March 1987

Résumé du rapport d'évaluation à mi-parcours

La zone du projet comprend un peu plus de la moitié du territoire de l'ORD de l'Est (provinces du Gourma, de la Gnagna et de la Tapoa). C'est une zone très vaste (27.000 km2) dont l'accès était difficile avant le projet. De nombreuses régions étaient totalement enclavées pendant la saison des pluies. L'agriculture y est principalement vivrière (sorgho et mil). L'élevage, qui joue un role essentiel dans l'économie de la zone, exploite par transhumance la complémentarité du Nord et du Sud. Cette région a connu, avant le démarrage du projet des périodes de forte pénurie alimentaire. La zone se caractérisait aussi par une faiblesse des services d'encadrement du développement rural.

Conception et objectifs du projet

Groupe cible

Le groupe cible est constitué des ménages paysans de la zone sans autre spécification. On prévoyait 8.000 familles bénéficiaires du projet. Les femmes ne font pas l'objet d'une attention particulière dans la conception du projet malgré le rôle important qu'elles jouent dans la production des cultures de rente et dans la commercialisation.

Objectifs et composantes

L'objectif du projet est d'assurer l'autosuffisance alimentaire des habitants de la zone, d'augmenter les revenus agricoles et d'améliorer la qualité de la vie.

Les objectifs spécifiques sont d'augmenter la production vivrière, de créer et faire fonctionner les infrastructures collectives de santé (dispensaires, maternités, puits), de services (moulins, banques de céréales, artisanat) et de désenclaver la zone.

Les principales composantes du projet sont:

  • le renforcement de l'ORD par la formation du personnel d'encadrement, la construction de logements et bureaux, l'équipement en véhicules, le soutien d'une assistance technique extérieure substantielle;
  • la mise à disposition de crédit de campagne (engrais, semences) pour 8.000 exploitations et de crédit moyen terme pour équiper 2.700 exploitations en culture attelée;
  • des aménagements fonciers portant sur la lutte contre l'érosion sur 5.000 ha (construction de diguettes en courbes de niveau) et l'aménagement de 1.000 ha de bas fonds pour la riziculture;
  • la construction de 108 km de routes de desserte et la création de 100 km de pistes d'accès aux routes de desserte;
  • la création d'un centre d'appui à la production agricole (Fermes semencières et Centre de recherche appliquée et de formation);
  • la protection sanitaire des animaux de trait: création d'un centre vétérinaire de 5 postes vétérinaires et de 10 centres de vaccination;
  • un Fonds de Développement Villageois (FDV) permettant de subventionner l'achat de matériaux de construction pour des équipements collectifs tels que maternités, dispensaires, puits, magasins pour stockage de céréales et de financer sur crédits des entreprises collectives ou individuelles génératrices de revenu;
  • la création d'une unité de suivi évaluation chargée de suivre l'ensemble des activités du projet et d'en évaluer les résultats.

Effets attendus et hypothèses

L'effet attendu du projet était l'autosuffisance de l'ORD sur le plan des céréales. Quelques 8.000 familles paysannes soit 18% des familles vivant dans la zone devaient voir leur revenu augmenter de 450 à 650 USD/an. Le programme de formation et l'édification d'institutions dans le cadre du projet devaient améliorer les capacités locales et faciliter la planification et la mise en oeuvre des programmes de développement futurs.

Le rapport de pré-évaluation considérait que les contraintes principales à l'adoption de pratiques culturales améliorées étaient le manque de services de vulgarisation permettant le transfert de "paquets techniques" aux paysans et le manque de crédit agricole. Un léger surplus de production (8.000t) devait être dégagé dans la zone du projet et devait être écoulé sans difficultés par l'OFNACER ou par les banques de céréales.

Évaluation

Evolution du contexte en cours d'exécution

Les campagnes 85/86 et 86/87 ont connu des conditions climatiques exceptionnellement favorables. L'excédent de production dans la zone de l'ORD a été très important.

Les orientations du gouvernement ont conduit à une politique de vérité des prix (le prix de l'engrais est passé de 90 FCFA/kg en 84 à 135 FCFA/kg en 86); un amenuisement des responsabilités du ministère de tutelle des ORD (le Ministère de lagriculture et de l'élevage ne conserve que les prérogatives relatives à la vulgarisation et à la production agricole proprement dite); des priorités du plan quinquennal 1986/87 accordées à l'aménagement intégré des terroirs.

Réalisations du projet

Formation et vulgarisation: un système de type "formation et visite" a permis d'encadrer 121 GP (soit 1.410 producteurs) en 1984-85, 280 en 1985-86 (5.866 producteurs) et 373 GV en 1986-87 (12.297 producteurs). Les thèmes vulgarisés concernent le labour avant semis (avec ou sans culture attelée), le semis en ligne, la fumure minérale, le sarclage, le buttage. L'apprentissage des techniques culturales est fait sur parcelles de démonstration puis sur champ collectif. Le projet a mis en place des centres de dressage temporaires (15 jours) des boeufs de trait.

Renforcement de l'ORD de l'Est: 60% des constructions prévues ont été réalisées, des véhicules et du personnel compétent sont disponibles.

Appui à la production: installation de deux stations d'essai qui ont permis des essais de techniques culturales et de variétés sur des protocoles fournis et suivis par des organismes de recherche nationaux et de la multiplication de semences (production de 12.000 kg).

Des bas fonds ont été aménagés sur 36 ha puis détruits par la première crue. Ce volet a du être mis en veilleuse car il nécessite des études préliminaires difficiles.

Des aménagements anti-érosifs ont été réalisés sur 2.073 ha (40% des objectifs).

Le FDV a utilisé 14 % des fonds prévus pour les équipements collectifs et 1% des fonds prévus pour les entreprises villageoises. 1 maternité, 10 puits villageois, 14 magasins de céréales ont été réalisés. Les banques de céréales ne fonctionnent pas et commencent à être convertie en magasins pour aliments du bétail. 2 moulins à grain communautaire ont été créés.

Le crédit agricole ne connait qu'un petit nombre d'emprunteurs (730 en 4 ans) et les encours sont très en dessous des prévisions: 21 millions de FCFA soit 5% du volume prévu pour le crédit court terme et 41 millions de FCFA soit moins de 15 % du volume prévu pour le crédit moyen terme.

Des routes ont été construites sur 98 km et 138 autres km mis en chantier.

L'unité de suivi évaluation n'a été installée que tardivement et n'a pas jusqu'à présent bénéficié d'appui technique extérieur.

Appréciation des effets du projet et de leur pérennité

Bénéficiaires: les bénéficiaires du système de vulgarisation et formation ont été 1 410 producteurs en 1984-85, 5 866 en 1985-86 et 12.297 en 1986-87.

Les effets du projet sont difficiles à apprécier. 1985 et 1986 ont été deux excellentes années pendant lesquelles l'ensemble de la zone a dégagé un fort excédent de production. On ne peut cependant préciser dans quelles mesure le projet a pu contribuer à ce résultat. L'effet du projet en année sèche semble limité. Les effets sur le developpement communautaire sont quasi inexistants (la création d'entreprises artisanales est restée embryonnaire, les banques de céréales n'ont pas bien fonctionné). Les effets des infrastructures routières sur le désenclavement sont très limités du fait des coupures fréquentes des principales pistes créées.

Effets sur les revenus des bénéficiaires: ils restent pour le moment négligeables.

Quant à l'impact sur l'amélioration de la qualité de la vie, les infrastructures collectives destinées à y contribuer ne sont pas encore opérationnelles.

Principaux problèmes rencontrés

Un faible taux d'adoption des techniques préconisées. Le dispositif de vulgarisation, par son quadrillage de la zone, a touché un grand nombre d'exploitations (12 000 en 86-87). Mais, seule une très faible proportion des paysans (2 à 3%) a généralisé l'emploi des thèmes techniques préconisés. En particulier, l'emploi des engrais reste marginal pour des raisons d'ordre économique: prix relativement élevé et rentabilité aléatoire dans les conditions technico-économiques actuelles. L'adoption de la culture attelée se développe plus lentement que prévu. Ceci semble provenir du manque de matériel de démonstration dans les unités d'encadrement et de la non disponibilité des charrues au moment opportun pour la vente. Un peu plus de 700 exploitations seulement ont été équipées en culture attelée.

Un système de crédit peu développé. Les encours sont très en dessous des prévisions. Plusieurs raisons peuvent expliquer ce faible développement: la faiblesse du revenu monétaire des paysans (pas de débouché pour les cultures de rente, sauf l'arachide dont le prix a fortement chuté en 1986); les insuffisances de la filière d'approvisionnement (en particulier charrues); le manque de dynamisme et de suivi du service de crédit fourni par le relais de l'ORD. En particulier, les éléments d'appréciation fournis par l'encadrement du projet sur la capacité de remboursement des emprunteurs sont inadaptés. D'autre part, la CNCA non décentralisée ne peut jouer correctement son role. Enfin, la ligne de crédit court terme FIDA n'a pas encore fait l'objet de retrocession de l'Etat à la CNCA.

Le taux d'impayé est de 41%. Des secteurs entiers ont été exclus par la CNCA pour impayés. Il est à craindre que les conditions dans lesquelles se fait l'apprentissage du crédit ne constitue à l'avenir un handicap pour l'utilisation du crédit agricole comme moyen d'améliorer les revenus paysans.

Une mauvaise commercialisation des produits agricoles. Toute la dynamique du projet est freinée par l'absence de débouchés pour les produits végétaux. Dans une conjoncture d'excédents céréaliers, le circuit officiel de commercialisation ne peut absorber le sorgho et le mil. On se trouve avec un marché inorganisé dans lequel les prix s'effondrent. En l'absence d'atelier d'egrennage, le coton doit supporter un coût de transport très élevé jusqu'à Ouagadougou. Le développement de la riziculture nécessite un désenclavement de la zone et l'installation de capacités de décorticage. Le prix de l'arachide a connu une sevère baisse (-43% en 1986).

Recommandations et leçons à tirer

Un schéma de financement des stocks ORD (équipements et intrants) adapté au calendrier des utilisateurs doit être mis en place. La ligne de crédit court terme FIDA doit être rétrocédée dans les meilleurs délais. Un fonds de garantie doit être constitué à partir de la ligne crédit FIDA ainsi qu'un fonds de bonification des intérêts. La répartition des taches entre ORD et CNCA doit être formalisée. Un moratoire pour les crédits passés impayés doit être ouvert. Si la commercialisation des produits agricoles (en particulier céréales) n'est pas améliorée, l'allocation de crédit devrait être beaucoup plus prudente et se limiter à des agriculteurs ayant également une activité d'élevage.

La construction/réhabilitation du tronçon de route entre Gayeri et Fada doit être effectuée.

La durée du projet devrait être prolongée sur les deux prochaines campagnes agricoles c'est à dire jusque fin 1989 et la zone du projet redessinée pour tenir compte du transfert de l'intervention de la CCCE sur la province de la Tapoa et de la complémentarité Nord-Sud des activités d'élevage.

L'aménagement de bas fonds doit être réduit à une action pilote car il demande des études techniques préalables. L'intégration agriculture-élevage doit être amplifiée par la création de points d'eau (retenues pour l'abreuvement des animaux) en vue d'organiser l'exploitation des parcours. Les interventions du projet doivent être concentrées sur une sélection de villages.

Trois leçons de porté générale peuvent être tirées de ce projet:

Le développement du crédit agricole nécessite que les exploitants disposent d'un minimun de revenu monétaire stable. Dans les régions dépourvues de culture de rente, l'introduction massive de crédit pour l'adoption de thèmes techniques en culture vivrière doit être examinée avec beaucoup de prudence.

En région soudano-sahélienne marquée par une forte variation interannuelle des rendements et des production, une plus grande attention devrait être accordée, au stade de la conception, au comportement du marché vivrier en année de bonne récolte et aux conditions d'écoulement des surplus. Une succession de quelques années de pénurie et de prix élevés des vivriers, ne devrait pas dispenser les concepteurs de projet d'analyser serieusement les capacités d'absorption des marchés et de prévoir des instruments de commercialisation adaptés à tous les cas de figure. Cette plus grande attention aux conditions de commercialisation est impérative lorsque l'on compte recourir au crédit d'équipement ou de campagne pour augmenter la production.

Lorsque les rapports de prix entre intrants et produits sont largement modifié au cours des premières années de mise en oeuvre du projet, la validité économique des thèmes techniques vulgarisés doit être rapidement re-examinée par l'institution coopérante et le bailleurs de fonds. Si cette révision conclue à la non rentabilité de ces paquets techniques sous les nouvelles conditions du marché, les crédits pour ces paquets techniques doivent être suspendus. L'allocation de crédits à des activités non rentables et l'accumulation d'impayés qui s'en suit, ont des conséquences extremement négative sur le développement de la région.

 

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