Rural futures in focus: Chad
Many of Chad’s rural people face ongoing fragility and crises. We caught up with Rachel Senn, IFAD’s Country Director for Chad, to learn more about the way forward.
Les petits producteurs et productrices agricoles subissent de plein fouet les effets de la crise climatique. Ce sont les premiers à subir les effets d’une sécheresse prolongée ou d’une inondation destructrice. Les déserts gagnent sur leurs petites parcelles et l’eau de mer empoisonne la terre dans laquelle ils plantent leurs cultures.
Trente-cinq pour cent des ressources vivrières trouvent leur source dans des petites exploitations de moins de deux hectares. En d’autres termes, lorsque leur capacité à produire des denrées alimentaires est menacée, le système alimentaire mondial tout entier l’est aussi.
Pourtant, les petits exploitants ne reçoivent que 0,8% des financements mondiaux de l’action climatique chaque année (soit une somme dérisoire de 5,53 milliards d’USD) pour s’adapter à cette nouvelle réalité climatique.
De combien auraient-ils besoin pour faire face aux défis climatiques actuels?
En tant que Spécialiste technique en chef du FIDA pour l’environnement et le climat, je plaide tous les jours en faveur d’investissements pour les petits exploitants. Dans un contexte marqué par des budgets du développement de plus en plus serrés, il est par ailleurs de plus en plus difficile de le faire sans chiffres concrets.
Cette difficulté est exacerbée par le manque de cohérence ou l’absence de nombreuses données et définitions, à commencer par une définition universelle de ce qu’est un petit producteur. Il en résulte des divergences dans l’évaluation de leurs besoins financiers.
Nous manquons de chiffres concrets depuis un certain temps. En 2009, les pays développés ont convenu de mobiliser, à l’horizon 2020, une somme quelque peu arbitraire de 100 milliards d’USD par an pour soutenir l’action climatique des pays en développement.
A suivi en 2015 l’engagement, en vertu de l’Accord de Paris, à définir un nouvel objectif chiffré collectif en matière de financement de l’action climatique. Cet objectif apportera des éclaircissements sur les financements mis à la disposition des pays en développement pour mettre en œuvre leurs prochains plans d’action climatiques nationaux, dus d’ici février 2025.
Le nouvel objectif chiffré collectif devrait être adopté cette année à la COP29, en Azerbaïdjan. Mais à quelques semaines seulement de la conférence, les négociateurs doivent encore se mettre d’accord sur les éléments de base essentiels à la mise en œuvre de cet objectif, en commençant par la somme d’argent nécessaire.
En l’absence d’estimation du déficit de financement de l’action climatique pour les petits producteurs, et compte tenu de l’échéance prochaine des objectifs de développement durable, j’ai calculé un chiffre approximatif, assorti de quelques mises en garde.
Je me suis basé sur une méthodologie simple. Comme indiqué précédemment, les petits exploitants produisent 35% des aliments dans le monde. Je me fonde sur ce chiffre pour calculer leur besoin proportionnel en matière de financement de l’action climatique.
Cette méthode est imparfaite: la part d’aliments produits n’équivaut pas nécessairement à la part de fonds nécessaires, surtout compte tenu du fait que la production des petites exploitations est touchée de manière disproportionnée par les sous-investissements et les changements climatiques.
Elle constitue toutefois une base prudente pour calculer l’écart. D’autres éléments pourraient servir de base, comme la part d’exploitations, la part de travailleurs agricoles employés sur les petites exploitations ou le nombre de personnes dépendant des petites exploitations pour se nourrir et gagner leur vie. Tous ces éléments donneraient lieu à une estimation bien plus élevée du besoin réel.
En 2020, les données de la Climate Policy Initiative indiquaient que le financement de l’action climatique devait être multiplié par sept et passer de 28,5 milliards d’USD à 199,5 milliards d’USD, pour correspondre aux scénarios de transition climatique même les plus prudents. Si l’on tient compte d’une inflation à long terme d’environ 3%, le besoin annuel total de financements de l’action climatique s’élève à 224,5 milliards d’USD.
Ce chiffre se fonde sur l’hypothèse que les coûts de l’adaptation et de l’atténuation sont identiques pour les petits producteurs et pour les autres types d’acteurs intervenant dans les systèmes agroalimentaires. En réalité, les petits exploitants se heurtent à des coûts démesurément plus élevés en raison d’un accès limité aux financements et aux technologies, de propriétés foncières fragmentées et d’une plus forte vulnérabilité aux changements climatiques.
Sur cette base, le déficit de financement entre les niveaux actuels et une estimation prudente des financements requis est alarmant, puisqu’il s’élève à 75 milliards d’USD chaque année.
Compte tenu du rôle central qu’ils jouent dans l’approvisionnement alimentaire de la planète, cela semble être un prix relativement faible à payer pour leur permettre de mieux adapter et protéger leurs moyens d’existence, mais aussi la sécurité alimentaire mondiale.
Le monde n’est pas prêt à faire face aux effets croissants des changements climatiques, et cela n’est nulle part plus évident que dans les communautés agricoles rurales. L’écart grandissant entre les financements climatiques dont ont besoin ces communautés et ce qu’elles reçoivent menace d’exacerber l’insécurité alimentaire, la pauvreté et les migrations.
Lutter contre ce déséquilibre est un impératif non seulement moral, mais aussi pratique. Investir dans les petits exploitants est l’une des solutions les plus efficaces pour protéger les systèmes alimentaires mondiaux.
Le message est simple: pour protéger la sécurité alimentaire mondiale, le financement de l’action climatique destiné aux petits exploitants doit d’urgence être multiplié par près de 14 par rapport à son niveau actuel. Nous devons atteindre l’objectif critique d’au moins 75 milliards d’USD.
Au FIDA, nous reconnaissons l’urgence de la situation, et savons déjà que les investissements ciblés dans les petits producteurs et productrices agricoles peuvent favoriser l’adaptation et renforcer la résilience des systèmes agricoles. Notre objectif est de financer l’action climatique rapidement et à grande échelle, en veillant à ce que les 500 millions de petits producteurs dans le monde reçoivent les ressources dont ils ont besoin pour s’adapter aux changements climatiques et pour garantir un approvisionnement alimentaire résilient pour tous et toutes à l’échelle mondiale.