Opinions & Idées | 15 janvier 2025

Et si les agricultrices étaient les stars du dîner?

Temps de lecture estimé: 4 minutes

Par Rene Castro

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René Castro est le Directeur de pays du FIDA pour la République dominicaine et le Salvador.

Lorsque nous allons au restaurant, nous somme généralement attentifs à la nourriture, à l’atmosphère et au service. De temps en temps, les clients rencontrent le chef et l’équipe qui est en cuisine, mais il est rare de pouvoir rencontrer et soutenir les petits producteurs et productrices ayant cultivé les aliments que nous avons dégustés.

C’est l’idée innovante derrière Agricultoras en Superación (Agricultrices en pleine ascension), un projet déployé en République dominicaine dans le cadre du programme gouvernemental Supérate. En septembre dernier, les stars du dîner étaient Yessy Almonte et Martha Torres, deux participantes au projet Prorural Inclusivo y Resiliente financé par le FIDA. Elles ont fourni les ingrédients qui ont été préparés par le célèbre chef Saverio Stassi à Saint-Domingue, la capitale du pays.

Une expertise agricole sur plusieurs générations

Yessy Almonte, issue d’une famille d’éleveurs de chèvres, a fourni la viande cuisinée au dîner d’Agricultoras en Superación. © SUPERATE

Yessy, agricultrice dans la province de Montecristi, descend d’une famille spécialisée dans l’élevage caprin depuis plusieurs générations. Elle a fourni la viande de chèvre pour le dîner d’Agricultoras en Superación. Martha, originaire de la province de Santiago Rodríguez, a, quant à elle, fourni du casabe, un pain à base de manioc fabriqué selon le savoir ancestral de la communauté autochtone des Taínos.

Ces agricultrices expliquent qu’elles sont ravies de participer à l’initiative Agricultoras en Superación, qui constitue pour elles une chance de présenter leurs produits, de tisser des liens et d’apprendre à cuisiner de nouveaux plats. C’est aussi bénéfique pour leurs entreprises, puisqu’elles reçoivent une partie des fonds récoltés lors du dîner.

Cette initiative donne aux femmes travaillant dans le secteur agricole les moyens de s’affirmer et en fait des actrices à part entière de la chaîne d’approvisionnement. Elles servent de modèles à d’autres petits exploitants et aux jeunes, prouvant que « celles et ceux qui savent ce qu’ils veulent et se battent pour l’obtenir peuvent atteindre leurs objectifs », comme l’explique Martha.

Martha Torres, agricultrice dans la province de Santiago Rodríguez, a apporté son pain à base de manioc au dîner d’Agricultoras en Superación. © SUPERATE

Sur le terrain, l’un des objectifs de Prorural Inclusivo y Resiliente est d’intégrer les agriculteurs et agricultrices dans les chaînes de valeur. Yessy et Martha soulignent l’aide qui leur a été fournie par un réseau d’organisations, comme le FIDA, le Ministère de l’économie, de la planification et du développement et Supérate, qui leur a permis d’intégrer « les filières de commercialisation des produits », comme l’explique Yessy.

« Ils nous donnent la possibilité de produire nos biens et de les vendre sur des marchés qui nous étaient auparavant inaccessibles », ajoute Martha.

Lutter contre les difficultés

Les petites productrices Yessy Almonte et Martha Torres aux côtés du chef Saverio Stassi lors du dîner à Saint-Domingue. © SUPERATE

Le développement rural peut offrir des solutions aux grands défis de la planète, notamment l’insécurité alimentaire. Selon les données les plus récentes, le monde est encore loin du deuxième objectif de développement durable, Faim zéro. Le nombre de personnes susceptibles d’avoir souffert de la faim en 2023 se situait entre 713 et 757 millions, et près de 2,33 milliards ont souffert d’insécurité alimentaire modérée ou grave. Par ailleurs, 2,83 milliards de personnes ne peuvent pas se permettre une alimentation saine. Cette situation n’est plus acceptable.

En Amérique latine et dans les Caraïbes, il existe des signes prometteurs de baisse de la faim et de l’insécurité alimentaire. Mais les Caraïbes à elles seules affichent des résultats plus décourageants, la prévalence de l’insécurité alimentaire modérée ou sévère étant plus de deux fois plus élevée (58,8%) que celle de l’Amérique centrale (28,2%) et de l’Amérique du Sud (25,1%).

Pour faire face à cette réalité, nous avons besoin de solutions innovantes, inclusives et équitables pour que les financements en faveur de la sécurité alimentaire et de la nutrition passent à une échelle supérieure, en particulier lorsqu’ils permettent de faire le lien entre les agriculteurs ruraux et le secteur privé.

Au FIDA, nous sommes fermement déterminés à soutenir le développement des petits producteurs. La croissance de leur activité se traduit par une meilleure qualité de vie dans les communautés rurales et une croissance de la production alimentaire pour nourrir les populations. Nous avons foi en les Yessy et les Martha de ce monde, parce que sans elles, sans leur travail, il n’y aurait pas de nourriture à mettre sur la table.

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