Opinions & Idées | 14 octobre 2024

Femmes rurales, l’avenir est entre leurs mains

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Ayant grandi aux côtés d’une mère somalienne fière et impavide, j'ai été bercée par les histoires de ma famille racontant des femmes rurales fortes, à la tête de leur exploitation, s'occupant des champs et du bétail, tout en prenant soin de leur foyer et de leur famille, même en temps de guerre ou de catastrophe naturelle.

Par conséquent, je sais que ces femmes, qui ont passé leur vie à bâtir un avenir meilleur dans les campagnes, sont les héroïnes oubliées de notre monde. Or avec les changements climatiques et la dégradation de l'environnement, leur tâche et leur vie deviennent encore plus difficiles, voire impossibles.

Le piège climatique

La crise climatique n'épargne personne mais les femmes rurales paient un tribut particulièrement lourd. Elles ont souvent une indépendance économique moindre que les hommes et elles sont bien moins souvent propriétaires de la terre qu'elles cultivent qu’ils ne le sont. Elles sont davantage frappées par les catastrophes climatiques et nombre d'entre elles n'ont pas les ressources nécessaires pour s'adapter à un monde en évolution. Partout dans le monde, les femmes vivent peu ou prou la même chose: leurs connaissances et leurs compétences sont souvent dévalorisées et ignorées.

Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Dans les foyers dirigés par une femme, les pertes de revenus imputables au stress thermique sont supérieures de 8% à celles des foyers dirigé par un homme. Les femmes sont davantage touchées par l'insécurité alimentaire que les hommes, de même que les populations rurales le sont davantage que les populations urbaines.

Mais il ne faut pas réduire les femmes rurales à des victimes de la crise climatique. Elles savent que notre bien-être est dépendant de celui de notre planète. Elles sont déterminées à protéger la Terre nourricière et ont le savoir nécessaire pour le faire, pour préserver la biodiversité, protéger nos terres et nos sources d'eau, et rendre notre alimentation plus durable. Toutefois, pour pouvoir pleinement réaliser leur potentiel, elles ont besoin de notre appui.

Les femmes que j'ai rencontrées

Par l'intermédiaire du FIDA, j'ai rencontré de nombreuses femmes rurales inspirantes qui tiennent l'avenir de leur communauté entre leurs mains. Sur chaque continent, elles gardent le cap dans la tempête climatique et continuent de nourrir leur famille et le monde. Toutes, sans exception.

L'une d'entre elles s'appelle Dionisia. Tout en cultivant sa petite parcelle de sorgho et de haricot mungo dans la campagne kenyane, elle recueille des données météorologiques essentielles. Tous les jours, elle relève soigneusement le niveau d'eau de son pluviomètre et transmet ses observations au Département de météorologie. Cette donnée peut paraître anodine mais elle est indispensable pour établir des prévisions à l'échelle locale.

En échange, Dionisia et d'autres petits producteurs et productrices reçoivent par SMS des conseils agricoles basés sur ces prévisions, informations qu'ils transmettent ensuite à d'autres agriculteurs et agricultrices. Ainsi, ils peuvent protéger leurs cultures face aux éléments.

Il y a aussi Soso, qui a installé un système de biogaz chez elle, dans le nord de l'Égypte. Ainsi, elle peut transformer les déjections de ses chèvres en combustible pour la cuisine. Non seulement elle n'a plus besoin de ramasser du bois mais elle réduit ses émissions de méthane, tout en produisant un excellent engrais. Les oranges de son jardin sont parmi les meilleures qu'il m'ait jamais été donné de goûter.

Soso (deuxième en partant de la gauche) et moi avons rencontré les équipes du FIDA à Motabas, en Égypte © FIDA/Aly Hazza

Ce dont les femmes rurales ont besoin

Ces femmes rurales, comme Soso et Dionisia, qui sont une source d'inspiration, méritent davantage que nos louanges. Elles ont besoin d'un appui solide pour poursuivre leur tâche et concrétiser la promesse d'un avenir meilleur.

Alors donnons aux femmes rurales les moyens de décider par elles-mêmes ce qui est bon pour la nature. En tant que gardiennes de nos systèmes alimentaires et de notre planète, elles doivent disposer des ressources, des débouchés et du pouvoir de décision dont elles ont besoin.

Faisons en sorte que leur voix soit entendue et répondons leurs besoins en matière de politiques, de plans et de projets de développement rural. C'est déjà ce que fait le FIDA mais toutes les institutions doivent le faire.

Abattons les obstacles et mettons un terme aux inégalités qui empêchent les femmes rurales de s'extraire de la pauvreté et de s'adapter aux changements climatiques.

Alors seulement, nous pourrons tous avoir foi en un avenir meilleur.

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