Au Nigéria, de jeunes handicapés s'épanouissent grâce au développement inclusif
Après avoir rejoint un groupe de cultivateurs conçu pour répondre à ses besoins, Margaret a pu reprendre sa vie en main.
En matière de flux migratoires, les gros titres de la presse et les chiffres masquent d’innombrables histoires de personnes ordinaires, qui aspirent à un avenir meilleur pour leur famille. Quelle que soit la destination de leur périple, leur parcours est unique.
Ousmane et Adama sont un couple de ruraux sénégalais qui s’est pris à rêver d’un avenir meilleur à l’étranger – et qui, avec le soutien du FIDA, a fini par le trouver à domicile.
Pêcheur originaire de Kafountine, au Sénégal, Ousmane a embarqué, en 2023, sur un petit bateau avec 80 autres personnes. Il était censé arriver sur les côtes européennes en six jours environ, où il espérait trouver un travail lui permettant de subvenir aux besoins de sa famille et de sa femme Adama, enceinte, restée au pays.
« Je connaissais beaucoup de jeunes qui avaient émigré et je voyais ce qu’ils faisaient pour leurs parents », explique Ousmane. « Ils leur faisaient construire de belles maisons. Nous, nous travaillons ici, à Kafountine, depuis plusieurs années, et nous dormons encore dans des maisons faites d’argile et de sable ».
Mais cinq jours après le début de la traversée, alors qu’il restait encore 200 km à parcourir, le bateau est tombé en panne sèche. Alors que le vent les poussait vers le large et qu’ils étaient à court de nourriture et d’eau, Ousmane a eu l’idée de fabriquer une voile de fortune avec tous les tissus présents à bord. C’était leur seul espoir.
Au bout de deux semaines, la mort a commencé à frapper à bord. L’un après l’autre, 34 corps ont été jetés à la mer.
« Comme vous le savez, l’eau de mer est très salée, 200 fois plus salée que l’eau douce », explique Ousmane. « C’est surtout ça qui a provoqué toutes ces morts. Ça s’est passé comme ça. Je n’en dirai pas plus. »
Au bout de 22 jours, le bateau a dérivé jusqu’aux côtes marocaines. Ousmane a débarqué, chancelant. Ses rêves d’Europe balayés. Le soulagement simplement d’être en vie.
Après avoir reçu de la nourriture et des soins, Ousmane et les autres survivants ont pris la route du sud, ont traversé la Mauritanie, et sont finalement rentrés au Sénégal.
Mais les raisons qui avaient motivé le départ d’Ousmane restaient d’actualité.
« La pêche était parfois bonne, parfois mauvaise », raconte-t-il. « Il arrivait qu’on travaille deux mois sans rien gagner. »
N’ayant pas les moyens d’investir pour acquérir son propre matériel de pêche, il dépendait non seulement des caprices de la mer, mais aussi du bon vouloir de ceux qui lui prêtaient ou lui louaient filets et matériel.
« C’est ça qui m’avait poussé à partir. Ça se passait comme ça. »
Le hasard a voulu qu’Adama, l’épouse d’Ousmane, n’accompagne pas son mari dans sa tentative d’émigration.
« On entend souvent qu’il n’y a pas de travail ici, et quand on voit un ami qui a émigré pour aider ses parents et sa famille, on a envie de partir aussi, pour en faire autant », explique-t-elle.
Mais lorsque l’occasion de quitter Kafountine s’est présentée, Adama était enceinte. Elle a décidé de rester. À l’époque, pour s’en sortir, elle prenait tous les travaux qui se présentaient sur le quai et écaillait les poissons pêchés par Ousmane.
Elle gagnait à peine de quoi couvrir ses propres dépenses quotidiennes et dépendait des gains irréguliers de son mari pour nourrir sa famille.
« Je travaillais comme tout le monde ici », raconte-t-elle. « Je disposais les poissons à même le sol et je les transformais du mieux que je pouvais. Je les lavais, je les dépouillais et je les séchais ».
C’est alors qu’elle a découvert le Projet Agri-jeunes, financé par le FIDA, et a appris à préparer du poisson séché de grande qualité. Après avoir suivi la formation, elle a été sélectionnée pour recevoir des fonds et bénéficier d’un mentorat pour créer son entreprise.
Le financement qu’elle a reçu s’est accompagné d’une formation à la tenue des comptes. Grâce à ces produits de meilleure qualité et ces compétences en gestion renforcées, elle a rapidement vu ses revenus augmenter.
« Avant ce financement, il m’arrivait de ne même pas pouvoir acheter trois caisses de poisson, ce qui équivaut à 50 000 francs (80 USD) », confie-t-elle. « Aujourd’hui, je peux acheter et transformer jusqu’à 250 000 francs de poisson (400 USD). »
Ousmane, Adama et leurs trois enfants n’ont pas la vie facile. Mais l’entreprise d’Adama permet de subvenir aux besoins de la famille tandis qu’Ousmane, de son côté, relance son activité sur un petit bateau de pêche.
« Grâce au soutien qu’elle a reçu, elle participe aux dépenses du foyer, je ne suis plus tout seul à assumer », explique Ousmane. Avec les revenus d’Adama, leurs enfants sont sûrs de rester scolarisés et d’être convenablement nourris.
Adama rêve déjà à la suite: elle veut acheter son propre local commercial, ainsi qu’un réfrigérateur, pour vendre des jus et des confitures fabriqués à partir des mangues de la région, très prisées.
« Je n’ai pas encore réalisé tous mes rêves, mais je pense qu’au rythme où ça va, plusieurs vont se concrétiser », conclut-elle.