Comment l'agrobiodiversité peut nourrir la planète

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Comment l'agrobiodiversité peut nourrir la planète

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Oxfam Novib

L’agriculture telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui est souvent néfaste pour la santé de la planète, et souvent aussi pour la nôtre. Pour que les populations et la Terre soient prospères, il est impératif de protéger la biodiversité, car c’est la variété étourdissante des écosystèmes et des êtres vivants (des microbes aux arbres, en passant par les baleines bleues), et l’éventail génétique de chaque espèce qui rend notre planète habitable.

Pourtant, l’agriculture, en particulier l’agriculture intensive, est l’une des premières causes du recul de la biodiversité et un facteur majeur d’accélération des changements climatiques. De plus, notre dépendance vis-à-vis d’un petit nombre de cultures et d’animaux rend nos systèmes alimentaires particulièrement vulnérables face aux changements climatiques, aux nuisibles et aux maladies. Et malgré tout, ces systèmes alimentaires ne parviennent pas à fournir à chacun les nutriments nécessaires: en 2020, près de 2,4 milliards de personnes n’avaient pas accès à une nourriture suffisamment nutritive.

Heureusement, une solution existe pour répondre à ces problématiques. C’est l’agrobiodiversité: l'agriculture est envisagée de façon à contribuer à la richesse de la biodiversité du monde et non à l’amenuiser. En musique, ce serait comme troquer un duo ou un quartet pour un orchestre symphonique au grand complet.

L’agrobiodiversité au service d’un développement durable

Le FIDA est conscient depuis longtemps de l’importance de l’agrobiodiversité pour un développement durable des systèmes alimentaires. Notre action auprès des petits producteurs ruraux – agriculteurs, pasteurs, pêcheurs, peuples autochtones et ceux qui transforment la nourriture ainsi produite – nous a montré que ceux-ci dépendaient de la biodiversité pour se nourrir convenablement, être résilients et gagner leur vie, et qu’ils la considéraient comme faisant partie intégrante de leur identité et de leur héritage culturel.

Les petits producteurs ne sont pas simplement des utilisateurs de la biodiversité: ils en sont aussi les gardiens. Ils savent que la biodiversité permet d’améliorer la production alimentaire grâce à des sols plus riches, au contrôle des nuisibles, à une meilleure utilisation des ressources en eau et à la pollinisation des cultures. Ils sont conscients du fait que des environnements riches en biodiversité sont plus résilients face aux changements climatiques et aux catastrophes naturelles. L’agriculture intensive à grande échelle est aujourd’hui la principale cause du recul de la biodiversité, tandis que l’agriculture à petite échelle aide à la préserver.

Une part importante de notre travail avec ces producteurs consiste à les aider à mettre en place des systèmes qui améliorent leurs revenus et leurs moyens d’existence, tout en protégeant, voire en accroissant, la biodiversité locale. C’est donc sans surprise qu’au deuxième Congrès international sur l’agrobiodiversité, nous avons signé le Manifeste de Rome afin d’encourager:

  • la diversification des aliments consommés dans le cadre de régimes alimentaires nutritifs, durables, abordables, acceptables, sûrs et accessibles à tous ;
  • la production de nourriture au sein de systèmes alimentaires diversifiés, résilients et durables ;
  • la préservation de l’agrobiodiversité afin de donner aux populations les moyens de transformer les systèmes alimentaires et d’améliorer leurs conditions de vie de manière durable et inclusive, aujourd'hui et demain.

De fait, nombre de projets financés par le FIDA appuient les objectifs du Manifeste de Rome. Récemment, lors d’un bilan, nous avons établi que plus d'un tiers de nos projets avaient une composante essentielle liée à la biodiversité et que 39% incluaient des activités sur cette problématique. Prenons quelques exemples récents.

Les gardiens des écosystèmes

Dans le nord du Burkina Faso, la pauvreté force souvent les habitants ruraux à surexploiter les ressources naturelles. Mais la dégradation à court terme de l’écosystème rend la perspective de moyens d’existence décents toujours plus lointaine.

Le projet Neer-Tamba, financé par le FIDA et mené en partenariat avec le Centre national des semences forestières, fournit un éventail de plantes adaptées aux conditions locales. Des communautés plantent actuellement plus de 84 000 arbres afin de ralentir l’avancée du désert, de créer des habitats pour la faune sauvage et de rendre des terres dégradées utilisables à nouveau.

À proximité des zones peuplées, les habitants cultivent des aliments nutritifs et des produits végétaux tels que le baobab, le ben ailé, le karité et la caroube, permettant aux communautés de préserver les ressources forestières tout en en tirant des bénéfices économiques.

Au Laos, le Programme en faveur de la sécurité alimentaire et nutritionnelle et de l'intégration aux marchés dans le sud du Laos (ou FNML), appuyé par le FIDA, apprend aux petits exploitants agricoles à fabriquer un compost riche contenant des micro-organismes efficaces et à s’en servir dans leur jardin potager. Les bonnes bactéries prospèrent, nourrissant les sols et limitant les nuisibles. Les agriculteurs disent que leurs légumes ont plus de goût et que la vie sauvage, comme les vers de terre et les coccinelles, est revenue. Les rendements ont grimpé en flèche, voire doublé, sans utilisation d’engrais chimiques.

Dans le biome de Caatinga, dans le nord-est du Brésil, le surpâturage et l’exploitation forestière ont entraîné une grave déforestation, tandis que les changements climatiques provoquent des sécheresses dévastatrices.

Dans le cadre du Projet de développement rural durable dans la région semi-aride de Bahia (Pró-semiárido), appuyé par le FIDA, des « gardiens des semences » créoles sont recrutés afin de faire pousser des centaines de variétés de plantes génétiquement différentes et de préserver la connaissance autochtone des cultures et de leur utilisation. Les femmes sont encouragées à faire pousser des arbres fruitiers autochtones dans les jardins, améliorant ainsi la sécurité alimentaire.

Ce projet a aussi mis en place des certificats de biodiversité afin que les agriculteurs tirent un meilleur prix de leurs produits et plus de 1 000 hectares de terres dégradées ont été restaurées.

Protéger la planète

La biodiversité sous-tend déjà nombre des initiatives du FIDA mais aujourd’hui, nous allons encore plus loin dans notre engagement. Dans le cadre de notre nouvelle Stratégie sur la biodiversité, nous intégrerons systématiquement cette problématique dans nos opérations en tant que moyen d’accroître la productivité et la sécurité alimentaire et nutritionnelle, et d’aider les communautés à s’adapter aux changements climatiques. C’est ainsi que nous avons choisi de concrétiser les idéaux énoncés dans le Manifeste de Rome.

Nous prévoyons d’allouer 30% de notre financement de l'action climatique à des solutions fondées sur la nature, plaçant la préservation de la biodiversité et des écosystèmes au cœur de l’adaptation aux changements climatiques.

La biodiversité est bénéfique pour la planète mais elle représente également la meilleure solution pour permettre aux populations rurales de se nourrir sainement, de célébrer leur identité culturelle et d’améliorer leurs moyens d’existence. C’est pourquoi nous sommes déterminés à aider les autorités et les communautés à en faire un pilier prioritaire de nos systèmes alimentaires.

À lire également sur l’action du FIDA en matière de biodiversité.