Dans les campagnes chinoises, de nouveaux horizons s'ouvrent pour les personnes handicapées

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Dans les campagnes chinoises, de nouveaux horizons s'ouvrent pour les personnes handicapées

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Plus jeune, Wang Cairong avait peur d’interagir avec des personnes extérieures à son cercle familial immédiat. Tout comme son père et sa sœur, elle est malvoyante et souffre de troubles du langage, des handicaps qui pèsent lourdement sur son estime de soi depuis son enfance. Mme Wang a grandi au sein de la communauté hui, l’une des principales minorités ethniques de la Chine, où les femmes handicapées ont peu de possibilités de gagner leur vie.

Même après son mariage, elle n’a pas réussi à trouver un emploi. L’agriculture est la principale activité exercée dans les zones rurales de Qinghai, la province d’origine de Mme Wang dans le nord du pays, et les débouchés y sont limités pour les personnes handicapées. C’est donc à son mari qu’il incombait de pourvoir à ses besoins et à ceux de leurs deux jeunes enfants.

L’histoire de Mme Wang pourrait être celle de nombreuses personnes handicapées partout dans le monde, en particulier dans les communautés rurales pauvres, où les obstacles économiques et sociaux préexistants les exposent davantage au risque d’exclusion. Heureusement, un nombre croissant de personnes sont sensibilisées à ce problème, qui est également de plus en plus souvent visé dans les politiques nationales.

En 2020, lors du lancement du plan national d’élimination de la pauvreté extrême, les autorités chinoises se sont vite rendu compte que les personnes handicapées étaient encore disproportionnellement représentées parmi les populations pauvres. En 2019, seulement 479 000 personnes handicapées vivaient dans l’extrême pauvreté (contre 7,19 millions en 2014), mais elles représentaient encore près de la moitié des personnes en situation d’extrême pauvreté. L’État chinois a donc commencé à mettre en place des programmes consacrés à l’inclusion des personnes handicapées dans les économies locales. Le FIDA a pu contribuer efficacement à cet effort national, dans le cadre de ses interventions en faveur du développement rural.

Un projet financé par le FIDA et mis en œuvre à Qinghai entre 2015 et 2020, a introduit dès son lancement des activités non agricoles adaptées aux personnes handicapées. Menée en partenariat avec la Fédération chinoise des personnes handicapées et plusieurs fédérations locales de femmes, cette initiative a notamment proposé des formations enseignant différentes compétences non agricoles, telles que la cuisine des spécialités locales pour les restaurants de fermes, les services de nettoyage et d’entretien ou encore l’artisanat artistique dans les styles de différents groupes ethniques locaux. Elle a également aidé ses bénéficiaires à trouver un emploi ou des circuits de distribution pour leurs produits après la fin de la formation.

Mme Wang à l’œuvre sur l’une de ses broderies

Lorsque l’initiative a atteint le village de Mme Wang, cette dernière s’est inscrite à un cours de broderie, et fut immédiatement conquise. Ces cours lui permettaient en effet de maîtriser un art grâce auquel elle pouvait contribuer aux revenus de sa famille, mais également de travailler en intérieur, dans une ambiance détendue et entourée de personnes qu’elle connaît, tout en profitant de l’appui et des services nécessaires à son bien-être.

Mme Wang a rapidement impressionné ses professeurs par la qualité de son travail et son talent artistique. Ses broderies se sont vendues à bon prix, et l’une de ses œuvres a même été présentée lors d’une exposition à Xining, la capitale de la province. Grâce à sa capacité à gagner sa vie en toute autonomie, elle a pris confiance en elle. Aujourd’hui, Mme Wang produit des œuvres remarquables destinées à la vente, et enseigne son art à 30 stagiaires dans le centre de formation professionnelle local.

« Mes produits peuvent être vendus sur un marché relativement stable grâce au centre de formation, ce qui me permet de rapporter un revenu décent à ma famille, explique-t-elle. Et ce qui me réjouit encore plus, c’est que certaines de mes amies, à mobilité réduite, ont elles aussi commencé à acquérir ce savoir-faire. »

Mme Wang était l’une des quelque 920 résidents du Qinghai à participer à des formations destinées aux personnes handicapées. Près de la moitié d’entre eux ont aujourd’hui trouvé un emploi, et 13% travaillent à leur compte. Bon nombre d’autres personnes handicapées de la région ont pu profiter des autres activités proposées par le projet.

Mme Anzu Feiye et M. Zhangsa Lihai, un couple hui malvoyant vivant avec ses trois enfants dans le village de Hekou, par exemple, vivait jusqu’à récemment en dessous du seuil de pauvreté de la Chine (2 300 CNY par personne et par an, soit à peu près le seuil de pauvreté international, fixé à 1,90 USD par jour).

M. Zhangsa, Mme Anzu et l’un de leurs fils, dans leur nouvelle cabane

Lorsque le projet du FIDA est arrivé dans leur village, toute la famille s’est inscrite à une formation consacrée à l’élevage de moutons. Le projet proposait une formation technique et une aide au démarrage, se traduisant par la distribution de stocks de fourrage et d’autres intrants essentiels, ainsi que par la construction d’une cabane. La vue de Mme Anzu étant meilleure que celle de son mari, le couple a décidé que ce serait elle qui suivrait la formation.

Aujourd’hui, les membres de cette famille élèvent quatre à cinq fois plus d’animaux qu’auparavant. Ils ont établi des circuits de distribution solides, et ont davantage confiance en leurs capacités à négocier un bon prix. En un mot, les revenus annuels qu’ils tirent de l’élevage atteignent aujourd’hui environ 40 000 CNY (6 300 USD). Leurs enfants ont de bons résultats scolaires, et apprennent même l’anglais – une opportunité que leurs parents n’ont jamais eu.

Les initiatives de ce type (qui ciblent les personnes les plus exposées au risque d’être laissées pour compte) ont joué un rôle central dans la lutte menée par la Chine contre la pauvreté extrême. Le Gouvernement chinois continue de mettre l’accent sur l’inclusion, et élabore, à l’occasion du renouvellement de son plan économique tous les cinq ans, un programme connexe présentant des politiques favorables aux personnes handicapées.

Le handicap est un sujet complexe qui s’accompagne de défis uniques, tels que la diversité des handicaps et la stigmatisation sociale des personnes affectées. Comme l’a montré le projet du Qinghai toutefois, la collaboration avec les organisations œuvrant en faveur des personnes handicapées peut aider à utiliser les connaissances et savoir-faire spécialisés pour trouver des solutions concrètes. Cette coopération donne de la valeur aux projets de développement rural et procure aux personnes handicapées l’aide dont elles ont besoin pour exploiter leurs nombreux talents et capacités pour leur propre bénéfice, celui de leur famille et celui de leur communauté.

Découvrez l’action du FIDA en Chine.

Cette histoire est l'un des deux articles publiés à l'occasion du Global Disability Summit 2022. Consulter l'autre article ici.