Les jeunes du groupe Greenthumb lancent leurs filets

IFAD Asset Request Portlet

Agrégateur de contenus

Les jeunes du groupe Greenthumb lancent leurs filets

Temps de lecture estimé: 7 minutes
©FIDA/Dhiraj Singh

Cette série sur l’Afrique orientale et australe porte sur les réalisations de cinq entreprises agricoles dirigées par des jeunes dans les comtés de Nakuru et Kilifi, au Kenya. Ces cinq entreprises, qui ont toutes remarquablement réussi, nous livrent un enseignement précieux en matière de développement rural, applicable à d’autres projets. Les groupes présentés dans cette série bénéficient tous de l’appui du Vijabiz, un projet financé par le FIDA qui, grâce au mentorat et à l’entrepreneuriat agricole, vise à donner aux jeunes les moyens de leur autonomie.

« L’agriculture n’est pas un sale métier », explique Robin Nginyi, un membre du groupe de jeunes Greenthumb. « C’est une activité que l’on peut pratiquer même si l’on a peu d’espace et c’est très rentable. »

Greenthumb est un groupement d’entrepreneurs agricoles établi dans le comté de Nakuru au Kenya, dont les activités ont démarré en 2014. Composé initialement de 28 membres, il compte aujourd’hui 10 jeunes âgés de 19 à 35 ans.

Au départ, le groupe cultivait des céréales et des légumes. Après plusieurs années, il a toutefois fallu admettre que la rentabilité espérée n’était pas au rendez-vous et les membres étaient prêts à se lancer dans une nouvelle activité. Ils savaient que la demande de poisson était élevée dans la région, mais avaient entendu dire que le lac Naivasha, le seul plan d’eau exploitable de la région, était déjà surpêché. Ils ont donc décidé de se tourner vers la pisciculture dans des étangs artificiels.

Nouvelles idées, nouveaux obstacles

Il a fallu surmonter de nombreux obstacles au début: l’approvisionnement en alevins (jeunes poissons dont l’âge est idéal pour lancer le cycle aquacole) était insuffisant et les aliments pour poisson disponibles étaient de mauvaise qualité. Le comté de Nakuru ne disposait pas de l’infrastructure requise pour accompagner des entreprises naissantes telles que Greenthumb. De plus, faute de formation formelle sur le maintien d’une présence sur le Web, les jeunes peinaient à trouver des clients.

En 2019, un responsable des pêches du comté de Nakuru les a finalement mis en relation avec l’équipe du projet Vijabiz, qui distribue des aides et organise des formations pour les entreprises agricoles naissantes dirigées par des jeunes Kényans. C’était une aubaine pour les jeunes de Greenthumb, d’autant qu’ils avaient un projet original à réaliser. Ils souhaitaient mettre à profit leur expérience dans l’agriculture et leur intérêt pour la pisciculture afin de créer leur projet d’aquaponie, système piscicole qui unit la culture de plantes et l’élevage de poissons. À l’issue d’une procédure de sélection rigoureuse, ils ont obtenu une subvention de 5 000 USD pour développer leur activité et reçu du matériel aquacole d’une valeur de plus de 10 000 USD.

En moins d’un mois, le groupe avait installé un bassin piscicole et sept stations d’aquaponie. Ces éléments, une fois combinés, forment un circuit fermé, qui permet de faire des économies d’argent et d’espace et de conserver l’eau. L’eau du bassin est épurée par les plantes cultivées, qui l’assimilent par les racines, et est ensuite réintroduite dans le bassin. La notion d’espace est extrêmement importante pour un groupe comme Greenthumb, qui, en raison du contrat de bail préexistant, a moins d’espace exploitable que beaucoup d’autres entreprises aquacoles.

Les membres de Greenthumb ont aussi bénéficié d’une formation intensive. Les représentants du projet Vijabiz ont tout appris au groupe, des fondements de la gestion d’une entreprise agricole aux meilleures pratiques propres au secteur des pêches, en passant par l’utilisation des réseaux sociaux pour stimuler les ventes. L’équipe du projet Vijabiz a également invité la moitié des membres du groupe à visiter une ferme piscicole prospère à Sagana, à 200 kilomètres à l’est de Nakuru, où ils ont pu acquérir une expérience pratique de la gestion des bassins et des soins à apporter aux poissons. En parallèle, grâce à des séances de formation sur l’encadrement et l’entrepreneuriat, le groupe Greenthumb a appris à travailler en parfaite harmonie.

La réussite de Greenthumb profite à la collectivité tout entière
Aujourd’hui, Greenthumb produit environ 1 000 tilapias par cycle d’élevage dans un plan d’eau d’à peine 70 m². La densité de mise en charge, à savoir 14 poissons par mètre carré, est bien supérieure à celle de la plupart des autres fermes piscicoles, où l’on compte en moyenne trois à quatre poissons par mètre carré. Toutefois, grâce au système de filtration des stations d’aquaponie, les poissons de Greenthumb sont en bonne santé et affichent une bonne croissance. Les stations sont utilisées pour la culture d’épinards, de kale, de morelle noire et d’amarante, qui sont des plantes indigènes. Tout bien considéré, malgré le manque d’espace, Greenthumb enregistre une productivité environ quatre fois supérieure à la moyenne des fermes piscicoles.

Après une phase de croissance, les poissons sont récoltés et transformés sous diverses formes, tandis que les plantes sont vendues sur différents marchés du comté de Nakuru. Grâce à une formation à l’utilisation des médias sociaux, Greenthumb dispose désormais d’une présence en ligne, qui lui permet d’attirer des consommateurs et de stimuler les ventes.

Et les fruits de ce travail ne s’arrêtent pas là. Le succès du projet a entraîné la création d’emplois tout au long de la filière pêche – vendeurs d’aliments pour poisson, chauffeurs qui transportent le poisson jusqu’aux marchés et marchands de poissons –, ce qui permet aux jeunes et aux petits producteurs de tout le pays de compléter leurs revenus.

Ce succès a également retenu l’attention des responsables des pêches. Encouragée par la réussite de Greenthumb, l’administration du comté a décidé de suivre son projet à titre pilote dans l’espoir d’inciter davantage de personnes à se lancer dans des pratiques piscicoles durables.

Quelles leçons?

L’expérience de Greenthumb nous rappelle la nécessité d’investir en continu dans l’économie bleue, à savoir l’utilisation durable des ressources océaniques pour promouvoir la croissance économique et l’amélioration des moyens d’existence.

Pour l’heure, le portefeuille du FIDA dans le domaine de l’économie bleue en Afrique orientale et australe se compose de trois programmes et projets: le Programme de développement de l’aquaculture (Kenya), le Projet de promotion de l’aquaculture artisanale (Mozambique) et le Programme de développement de l’agriculture et de la pêche (Tanzanie). Les perspectives de diversification et de commercialisation sont immenses dans la région, en particulier si des partenariats sont établis avec le secteur privé (organisations régionales de gestion des pêches, par exemple) et des organismes publics. Par exemple, le FIDA étudie actuellement les possibilités de collaboration avec l’Union européenne dans le cadre de projets halieutiques menés dans la région. Les conditions idéales sont ainsi réunies pour militer en faveur de la mise en place d’un environnement porteur (établissement de politiques régionales et nationales favorisant une croissance équitable et la durabilité environnementale).

De plus, le succès de Greenthumb apporte la preuve concrète que les investissements du FIDA dans ce secteur peuvent appuyer la création d’emplois pour les jeunes hommes et les jeunes femmes dans les filières de l’économie bleue (en particulier, les secteurs innovants, tels que l’aquaponie), la formation des jeunes aux technologies de l’information et des communications et à d’autres compétences entrepreneuriales utiles, ainsi que la création d’une source de revenus stable. C’est aussi la preuve que de nombreux gouvernements investissent dans l’épanouissement des jeunes de leurs pays. Outre la subvention du projet Vijabiz, Greenthumb a reçu un financement de 2 000 USD du Ministère kenyan de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche.

L’exemple de Greenthumb est un pas dans la bonne direction et pourrait faire des émules dans les autres projets du portefeuille du FIDA consacré à l’économie bleue.

Écoutez les voix des jeunes du groupe Greenthumb raconter leur projet ici.

Découvrez l’action du FIDA au Kenya.

Retrouvez le premier épisode de cette série sur l'Afrique orientale et australe