Les variétés de riz résistantes à la sécheresse, un atout pour les agriculteurs même les années sans sécheresse

IFAD Asset Request Portlet

Agrégateur de contenus

Les variétés de riz résistantes à la sécheresse, un atout pour les agriculteurs même les années sans sécheresse

Temps de lecture estimé: 6 minutes
©FIDA/Mathilde Lefebvre

Les changements climatiques menacent la production agricole mondiale de bien des façons, mettant en péril notre approvisionnement alimentaire et les moyens d’existence des populations rurales. Dans les environnements isolés ou défavorables à la culture du riz, où la production est déjà limitée par des facteurs de stress comme la sécheresse, la salinité et la submersion, les changements climatiques entraînent des risques supplémentaires. Les agriculteurs sans système d’irrigation et qui pratiquent une production pluviale sont particulièrement vulnérables à la sécheresse. Heureusement, certaines technologies agricoles, telles que les variétés de riz résistantes au stress, peuvent les aider à s'adapter aux changements climatiques. Le riz résistant au stress est un type de variété développée récemment par les sélectionneurs de plantes pour résister aux pertes de rendement dues aux chocs climatiques, tels que la sécheresse et les inondations.

Le Consortium de recherche sur la riziculture en environnement défavorable, financé par le FIDA, a été créé en 2009 pour aider les riziculteurs d’Asie du Sud et du Sud-Est à accroître leur résilience face aux chocs climatiques. Il a permis d’adapter les variétés de riz résistantes au stress aux milieux locaux et d’améliorer l’accès des exploitants agricoles aux semences. Dans la région des moyennes montagnes du Népal, sensible à la sécheresse, le Consortium de recherche sur la riziculture en environnement défavorable a permis de créer des groupes de producteurs de semences chargés de produire et de vendre aux agriculteurs locaux des semences de riz résistant au stress de haute qualité. En augmentant l’offre de semences de variétés de ce type de riz dans la région, ces groupes en ont facilité l’adoption.

En 2018, notre équipe de recherche basée à Virginia Tech a reçu un don du FIDA pour étudier comment l’adoption des variétés de riz résistantes au stress au Népal affecte les rendements et les pratiques de production des exploitants agricoles. Étant donné qu’il n’y a pas eu de sécheresse cette année-là, notre étude a cherché à déterminer les rendements de ces variétés au cours d’une saison caractérisée par des précipitations adéquates. Les décideurs politiques doivent savoir comment les variétés de riz résistantes au stress évoluent dans toutes les conditions météorologiques, afin d’évaluer si elles constituent de bons investissements pour aider le secteur agricole à s’adapter aux changements climatiques. Bien que les variétés de ce type puissent être plus bénéfiques durant les années de sécheresse, leur performance durant les années sans sécheresse contribue à leur rentabilité globale et incite les exploitants agricoles à continuer de les cultiver. 

Nous avons interrogé 900 agriculteurs de trois districts du Népal pour en savoir plus sur leur production de riz en 2018 pendant la mousson, principale saison rizicole du pays. Nous avons recueilli des informations sur les caractéristiques des exploitations et des agriculteurs, ainsi que sur les variétés de riz cultivées, le rendement et les pratiques de production. Les variétés de riz résistantes au stress étaient populaires parmi les agriculteurs; environ 20% des semences de riz plantées pendant la saison des moussons étaient issues de ces variétés. Ce succès est partiellement attribuable aux groupes de producteurs de semences, qui ont renforcé l’offre et l’adoption des variétés de ce type dans leurs villages et les villages voisins. Les agriculteurs ont également produit des variétés locales, qui sont cultivées depuis des générations, mais qui ont généralement un faible rendement, ainsi que d’autres variétés modernes et des semences hybrides, qui ont toutes deux un rendement élevé, mais qui ne résistent pas aux aléas climatiques. Les agriculteurs étaient ravis de nous parler de leur transition vers la culture de variétés de riz résistantes au stress. Un exploitant agricole, dont les terres avaient subi un certain stress hydrique cette saison-là, nous a présenté deux poignées de céréales qu’il avait récoltées, l’une d’une variété locale et l’autre d’une variété résistante au stress. Le grain de la variété locale était décoloré et truffé de cosses vides, tandis que celui de la variété de riz résistante au stress semblait sain et, selon les dires de l’agriculteur, avait généré un rendement satisfaisant cette année-là. Dans un autre village, un chef de village nous a confié que les agriculteurs de sa communauté commençaient à planter des variétés de riz tolérantes au stress même s’ils n’avaient pas connu de sécheresse, afin de se prémunir d’éventuelles difficultés à l’avenir.

Nous avons constaté que l’adoption des variétés de riz tolérantes au stress était bénéfique pour les agriculteurs, même les années sans sécheresse. Après avoir vérifié les caractéristiques des agriculteurs et des terres susceptibles de fausser nos résultats, nous avons estimé que les variétés tolérantes au stress augmentaient les rendements moyens de près de 30% par rapport aux variétés locales. Cette différence de rendement est à peu près identique à celle obtenue avec d’autres variétés modernes, ce qui signifie qu’en plus de protéger les agriculteurs contre les baisses de rendement pendant les années défavorables, la culture de ces variétés n’entraîne pas de baisse de rendement pendant les années favorables, si on la compare à d’autres variétés à haut rendement. Les semences hybrides atteignent des rendements encore plus élevés que les variétés modernes, mais elles sont coûteuses et peuvent être inaccessibles pour certains agriculteurs. Les variétés de riz tolérantes au stress réduisent également les écarts de rendement par rapport aux variétés locales, ce que ne font ni les autres variétés modernes ni les hybrides. Enfin, l’adoption de variétés modernes et de semences hybrides réduit le temps qui sépare la plantation et la récolte et incite les agriculteurs à modifier certaines pratiques de production, notamment à utiliser davantage d’engrais chimiques. Cela peut aider les agriculteurs à accroître leurs revenus et leur résilience aux aléas climatiques.

Dans les années à venir, le climat devrait devenir plus instable, rendant des phénomènes tels que la sécheresse de plus en plus fréquents. Les technologies agricoles joueront un rôle essentiel pour aider les agriculteurs à s’adapter et à survivre. Nos résultats fournissent aux décideurs politiques des données attestant des avantages des variétés de riz tolérantes au stress au Népal et les aideront ainsi à prendre des décisions et à investir pour permettre aux agriculteurs vivant dans des environnements rizicoles défavorables de s’adapter aux changements climatiques, de manière à protéger leurs moyens d’existence et leur avenir.

Pour en savoir plus sur notre étude, veuillez consulter notre nouvelle publication parue dans la collection « Research » du FIDA: How the adoption of drought-tolerant rice varieties impacts households in a non-drought year: Evidence from Nepal (Comment l’adoption de variétés de riz tolérantes à la sécheresse profite aux ménages, même les années sans sécheresse: l’exemple du Népal).

Kate Vaiknoras est chercheuse en agroéconomie au service de recherche économique du Département de l’agriculture des États-Unis (USDA). Parmi ses sujets d’étude, elle s’intéresse à l’adoption et aux effets des techniques agricoles, en particulier les variétés de semences améliorées. Elle a conduit des études de terrain au Népal et en Ouganda.

Les constatations et conclusions présentées dans le présent billet sont celles émises par l’auteure et ne sauraient être interprétées comme le reflet de l’une quelconque des positions ou politiques de l’USDA ou du Gouvernement des États-Unis d’Amérique. L’étude présentée a été financée en partie par le service de recherche économique de l’USDA. Ces travaux ont également été financés par l’Institut national pour l’alimentation et l’agriculture de l’USDA (projet Hatch VA-160102).