Préservons les marchés de produits frais

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Préservons les marchés de produits frais

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©FIDA/Susan Beccio

L’expression “marché de produits frais” désigne un marché où l’on peut acheter des produits frais, de la viande et du poisson. Ces marchés sont souvent confondus avec les marchés d’animaux vivants, où ces derniers sont présentés dans des cages, avant d’être vendus comme spécialités culinaires ou pour leurs propriétés médicinales.

Depuis le début de l’épidémie de COVID-19, de nombreuses informations, vraies et fausses, ont circulé à propos des marchés de produits frais. Partout dans le monde, des voix se sont élevées pour qu’ils soient plus strictement réglementés, voire fermés. Or ces marchés jouent bien souvent un rôle important dans l’amélioration des régimes alimentaires des populations rurales pauvres et constituent un débouché essentiel pour les paysans, qui peuvent y vendre leur production directement aux consommateurs.

Ces derniers mois, dans un contexte de confinement quasi généralisé, l’origine du nouveau coronavirus et les raisons de sa propagation si rapide ont été étudiées de plus près. Pour beaucoup, le virus serait passé d’une chauve-souris à un pangolin ou un autre animal sauvage qui aurait ensuite été vendu sur un marché de produits frais de Wuhan, en Chine. Des théories similaires ont circulé par le passé pour expliquer l’apparition d’Ebola ou du VIH-SIDA. Les épidémiologistes constatent que certains schémas se reproduisent: une croissance rapide de la population qui vient empiéter sur les forêts et les autres habitats naturels;  des animaux de la ferme et des humains se retrouvant en contact plus rapproché avec la faune sauvage; des systèmes d’élevage intensif où les animaux occupent des espaces restreints, ce qui favorise la propagation des maladies.

©FIDA/GMB Akash

Les marchés de produits frais sont importants pour l’alimentation des populations rurales, notamment les plus pauvres. En effet, c’est là qu’elles trouvent une grande variété de produits frais et nutritifs à des prix abordables. En règle générale, ils proviennent d’exploitations locales. Au Viet Nam, et probablement dans bien d’autres pays, les populations rurales et les citadins pauvres accordent beaucoup d’importance à la “fraîcheur” des produits, considérée comme une preuve de qualité et de sécurité. C’est tout particulièrement le cas de la viande: elle a plus de valeur si elle est “chaude”, c’est-à-dire si l’animal a été abattu sur place le matin même.

Les marchés de produits frais offrent également une gamme de fruits, de céréales et de légumes plus large que les supermarchés. Cette diversité s’explique par le fait que les marchés proposent des produits locaux alors que les supermarchés s’approvisionnent auprès de grossistes et qu’ils achètent en grande quantité un nombre limité de produits, ensuite stockés dans des chambres froides.

Et l’hygiène et la sécurité sanitaire des aliments?

L’hygiène et la sécurité sanitaire des aliments font sans conteste partie des points faibles des marchés de produits frais. Les animaux sont souvent abattus à l’intérieur du marché, près des zones de vente au public, ce qui peut entraîner des problèmes d’hygiène et de stockage de la viande. Les chambres froides et les équipements adaptés (couteaux et surfaces de découpe propres notamment) sont rares. Le traitement des effluents qui résultent de l’abattage des animaux entraîne un risque non négligeable pour l’environnement et la santé humaine.

Sur les marchés, l’hygiène est capitale. Les marchés de produits frais traditionnels doivent s’engager à proposer à leurs clients des produits locaux, frais et sains. Le FIDA a investi en faveur des marchés ruraux. Au Bangladesh, par exemple, le Projet de développement de l’infrastructure commerciale dans les Charlands (MIDPCR) et le Projet d’infrastructure côtière résistante aux aléas climatiques (CCRIP) ont été de francs succès. Ils ont permis d’améliorer l’infrastructure des marchés et de renforcer les normes d’hygiène. Mais l’infrastructure ne suffit pas. Des politiques et des normes doivent être élaborées et appliquées pour assurer la pérennité des marchés de produits frais, source d’aliments sûrs pour les populations rurales et les plus pauvres.

Les marchés sont-ils en concurrence avec les supermarchés?

Dans les zones urbaines, marchés de produits frais et supermarchés coexistent, tandis que, dans les zones rurales, les marchés sont souvent la seule source de denrées. Chacun a ses avantages. Les normes d’hygiène des supermarchés sont plus rigoureuses et permettent de suivre l’origine des produits en cas de problème. Cependant, les clients ne se fient pas toujours aux étiquettes et préfèrent les vendeurs des marchés, qu’ils connaissent souvent depuis des années et à qui ils font confiance. En outre, les prix sont souvent moins élevés sur les marchés, ce qui permet aux plus pauvres d’avoir accès à des aliments frais et nutritifs. Dans les zones rurales reculées des pays en développement, il n’y a parfois aucune alternative puisque les supermarchés n’existent tout simplement pas.

Il n’est pas nécessaire de fermer les marchés de produits frais, mais il faut les rendre plus sûrs en utilisant des infrastructures et des équipements adaptés et en appliquant des normes et des politiques d’hygiène et de protection de l’environnement. Il serait par exemple capital que des lois interdisent la chasse et le commerce des animaux sauvages.

Les populations pauvres doivent avoir accès à des denrées alimentaires nutritives et bon marché. Dans les zones rurales des pays en développement, les marchés sont bien souvent le seul endroit où elles peuvent se les procurer. Les agriculteurs locaux, les femmes notamment, dépendent de la vente de leur production sur les marchés locaux. Les familles ont besoin de ce revenu pour s’acheter des vêtements, payer les frais de scolarité de leurs enfants, régler les frais médicaux ou se procurer d’autres produits de première nécessité. Fermer les marchés de produits frais n’est pas une solution. Il faut commencer par mettre l’accent sur les normes relatives à la santé et à la sécurité.