Tracer la bonne route. Les réformes sectorielles dans l'industrie de la laine et du mohair au Lesotho

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Tracer la bonne route. Les réformes sectorielles dans l'industrie de la laine et du mohair au Lesotho

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L’industrie de la laine et du mohair du Lesotho est empreinte d’histoire et de tradition. Depuis les années 1800, les moutons du pays donnent une laine de haute qualité et les chèvres angora fournissent du mohair, un tissu plus fin et d’une brillance remarquable. La plupart de ces chèvres et de ces moutons sont répartis en petits troupeaux gérés par de petits exploitants ruraux, dont l’activité constitue le socle de l’économie du Lesotho.

Au fil des ans, le secteur a mis en place un réseau solide qui relie les producteurs locaux du Lesotho aux intermédiaires d’Afrique du Sud, qui achètent le produit brut, puis le transforment et le vendent. Ce réseau a également intégré de nombreux services annexes comme la fourniture de races améliorées, d’équipements adaptés ou d’articles tels que des médicaments pour le bétail, des formations sur la gestion du bétail et des pâturages et l’accès aux prêts.

Toutefois, les autorités du Lesotho se sont rendu compte que ce système, bien que bénéfique, empêchait les agriculteurs du pays de tirer pleinement parti des fruits de leur travail. En 2018, les pouvoirs publics ont commencé à prendre des mesures visant à nationaliser l’industrie, en adoptant des règlements restrictifs et en exigeant que les licences relatives aux hangars de tonte, aux tests, au commerce et aux enchères ne soient accordées qu’aux citoyens du Lesotho. Ces mesures avaient pour objet de créer des emplois, d’augmenter les revenus des agriculteurs et les recettes fiscales nationales, et de réduire la dépendance de l’industrie à l’égard des intermédiaires et des marchés extérieurs.

Bien que ces réformes aient été conçues dans l’intention de créer des emplois, elles se sont soldées par d’importants bouleversements. Ni les intermédiaires ni les autres intervenants du secteur n’ont été consultés de manière adéquate avant ces changements, de sorte qu’ils n’étaient pas préparés à en gérer les effets. Une seule entreprise locale remplissait les conditions requises à l’obtention de la licence d’intermédiaire, et les réductions de capacité qui en ont résulté ont considérablement retardé les paiements aux agriculteurs. Tous les autres services intégrés dans la filière – équipements, médicaments, prêts – ont également été perdus. En 2019, les agriculteurs ont organisé des protestations dans tout le pays.

Bien que les règlements aient été modifiés fin 2019 et que davantage de licences d’intermédiaires aient été délivrées, le secteur faisait toujours face à des difficultés importantes. Conscient de la nécessité de bénéficier de conseils, le Gouvernement lesothan a demandé au FIDA de l’aider à dialoguer avec les parties prenantes du secteur et à chercher des solutions pour sortir de l’impasse.

L’appui du FIDA a contribué de manière décisive au développement de l’industrie de la laine et du mohair au Lesotho, notamment grâce à son projet phare, le Projet d’appui à la production de laine et de mohair (également connu sous son acronyme anglais WAMPP). Quand les autorités ont fait appel au Fonds pour la première fois, l’équipe de pays du FIDA au Lesotho est intervenue en tant que médiatrice, et a organisé plusieurs tables rondes afin de maintenir une communication permanente.

Le FIDA et l’équipe de projet ont également demandé à ce que soit réalisée une étude visant à analyser l’impact des réglementations de 2018 et à orienter les révisions futures des politiques. L’étude, qui a été menée en 2020, a porté sur les effets de ces réglementations sur de nombreuses filières au Lesotho, et en particulier sur l’industrie de la laine et du mohair. L’étude s’inscrivait également dans le cadre de la participation du FIDA à l’élaboration des politiques au niveau des pays, une initiative permanente du Fonds visant à encourager un changement de politique en faveur du développement agricole et rural.

Les principales constatations de l’étude ont mis en évidence une disparité croissante entre les prix locaux et les prix mondiaux de la laine pendant la saison qui a suivi l’introduction de la réglementation. Selon l’étude, les bergers auraient pu gagner entre 10 et 13% de plus si les prix fixés par le nouvel intermédiaire au Lesotho avaient continué à suivre les tendances des marchés mondiaux. Il a en outre été constaté que les évolutions positives avaient été anéanties par de lourdes pertes. Par exemple, même si les commissions payées par les agriculteurs (dans le cadre de leurs ventes aux intermédiaires étrangers) avaient diminué après l’introduction des réglementations, la perte des services annexes intégrés et les graves impacts qui en résultaient sur la fonctionnalité globale du secteur contrebalançaient tout gain potentiel.

Cependant, en contraste avec ces effets négatifs, les chercheurs ont souligné le potentiel d’évolution positive que la réglementation permettait. La modification de la législation a ouvert la voie à des discussions sur l’amélioration des systèmes de commercialisation de la laine et du mohair dans le pays, sur le renforcement des filières et sur l’avancement des autres objectifs en matière de localisation, comme prévu initialement. Il reste toutefois difficile de déterminer quels éléments du système de commercialisation pourraient être situés à l’intérieur du pays et lesquels devraient être établis en collaboration avec des partenaires en Afrique du Sud. Pour surmonter ces difficultés, il sera nécessaire de consulter de nombreuses parties prenantes et de rétablir la confiance entre les acteurs concernés. Les équipes du Projet d’appui à la production de laine et de mohair et le FIDA appuient pleinement ce processus.

Les réformes – et leurs conséquences – continuent d’être une source de controverse et de mécontentement parmi les agriculteurs du secteur. Néanmoins, de nombreuses pistes d’amélioration de la valeur ajoutée dans le pays existent – par exemple, l’établissement de liens avec l’industrie de la mode éthique et l’intégration aux marchés des « fibres vertes » haut de gamme. Comme l’indique l’étude, fournir des financements aux producteurs et aux autres acteurs en amont est un autre pas important dans la bonne direction. Le FIDA reste déterminé à appuyer le secteur et à aider le gouvernement à atteindre son objectif initial qui était de renforcer les filières laine et mohair au Lesotho.

Découvrez l’action du FIDA au Lesotho.