PAROLE AUX RURAUX


Défis. Espoirs. Solutions.

 « J’ai la conviction que tous ces efforts permettront d’offrir un avenir plus juste aux agriculteurs et agricultrices du monde entier: un environnement plus sain, avoir tous accès à une alimentation saine et équitable, une eau de qualité, la dignité pour tous. »
Denise Cardoso - Présidente d'une coopérative d'agriculture familiale au Brésil

Quand on parle de transformation des systèmes alimentaires, les petits producteurs des zones rurales sont nos experts sur le terrain: ils savent ce que signifie composer au quotidien avec des défis tels que les changements climatiques et ce que veut vraiment dire produire des aliments de qualité pour tous.

Nous sommes allés à leur rencontre, petits exploitants et producteurs du monde entier, pour leur donner la parole et les écouter raconter leurs réussites et de leurs vicissitudes. À nous, à présent, de faire entendre leurs voix.

Faites la connaissance des femmes et des hommes qui sont au cœur de nos systèmes alimentaires et découvrez quelles sont leurs inquiétudes, leurs espoirs ainsi que les solutions qu’ils mettent en œuvre pour bâtir un avenir meilleur.


-Temesgen Tchane -
Cultivateur de blé en Éthiopie

« Bien sûr, nous voulons améliorer nos moyens d’existence et nous espérons que tout ira mieux demain, mais les risques et l'inquiétude de voir notre revenu annuel diminuer sont bien réels. »


Sa solution?
La modernisation.

Temesgen, cultivateur de blé en Éthiopie, a constaté de nombreux changements positifs ces derniers temps. Ses rendements ont augmenté, et lui et sa famille ont une meilleure alimentation. Même s’il vit loin de la ville, il est intarissable sur le développement urbain et rural que connaît le pays.

Toutefois, il a peur que cela ne suffise pas. Les changements climatiques ont provoqué de longues périodes de sécheresse. Résultat: le blé est menacé par la boukaya, une herbe épaisse qui a envahi une partie des terres. La sécheresse ou d’autres nuisances amputent systématiquement les récoltes; il a donc du mal à savoir combien de blé il pourra vendre. 

Mais Temesgen reste optimiste et convaincu que la solution réside dans la modernisation. Il voudrait avoir un tracteur et d’autres équipements qui lui permettraient de travailler plus efficacement. Il cherche aussi des outils qui l’aideraient à éliminer la boukaya plus vite qu’elle ne pousse. Enfin, il aimerait également trouver des semences de qualité, avec lesquelles il pourra produire un blé nutritif et résistant.

Alors que le monde s’engage en faveur d’un avenir plus durable, il espère être prêt et disposer des solutions technologiques qui aideront à maintenir le système alimentaire en bon état de marche.



- Shirley Casachagua -
Céramiste au Pérou

« Nous devons laisser en héritage aux générations futures des racines et des ailes. Des racines pour qu’elles tiennent bon dans leurs principes et leurs valeurs. Des ailes pour qu’elles puissent voler vers de nouveaux horizons. »

Elle rêve d’un monde équitable, inclusif, interconnecté.

Shirley voit l’harmonie dans tout ce qu’elle fait. Elle ressent son lien à la Terre quand elle façonne ses poteries, et son vécu comme ses difficultés font écho à ceux des autres membres de sa communauté de femmes et artisanes.

Il n’y a donc rien de bien étonnant à ce qu’elle déteste ce qui sonne faux: elle ne fait aucune confiance aux multinationales qui s’approchent de la terre de ses ancêtres.

Elle s’inquiète aussi des fortes variations de température provoquées par les changements climatiques.

Toutefois, son principal problème tient aux obstacles qui empêchent tant de femmes d’accéder aux perspectives, aux responsabilités et au respect dont bénéficient les hommes.

Elle le sait: pour avancer, il faut d’abord renouer les liens. Elle voudrait que les industries qui contribuent le plus aux changements climatiques soient surveillées de plus près. Elle espère que les réseaux de télécommunication vont encore s’étendre.

Mais, surtout, elle veut que les inégalités femmes-hommes de toutes sortes disparaissent et que partout les femmes puissent ainsi pleinement réaliser les promesses qu’elles portent.


- Shabana Bibi -
Agricultrice et couturière au Pakistan

« Pour moi, l’avenir ne sera meilleur que si on élimine la pauvreté. »


Sa solution? La finance inclusive.

La journée de Shabana débute avant le lever du soleil. Chaque jour de l’année, une fois les enfants partis pour l’école, elle prend la direction des champs, peu importe qu’elle soit ou non malade, et ce par tous les temps.

Lorsqu’on l’appelle pour travailler dans un champ loin de chez elle, elle ne rentre qu’à la nuit tombée. Ensuite, si elle a reçu des travaux de couture dans la journée, elle coud jusque tard dans la nuit.

Son mari et elle ont beau travailler sans relâche, les fins de mois sont difficiles. Sans compter qu’il y a toujours une dépense imprévue. Le prix des pommes de terre a récemment doublé par exemple. C’est un cercle vicieux, que Shabana et tant d’autres comme elles en situation de pauvreté ne connaissent que trop bien

Pourtant, petit à petit, les choses s’améliorent. Shabana a désormais quelques animaux qu’elle élève et qu’elle vend, et un peu de blé qu’elle va pouvoir semer.

Et surtout, les jours où tout va mal, elle se raccroche à la raison pour laquelle elle travaille aussi dur: elle veut absolument que ses enfants aillent à l’école et fassent des études, parce qu’elle sait que leur génération devra porter le changement.

Mais pour l’heure, elle voudrait que les dirigeants de ce monde sachent que, si la pauvreté n’est pas radicalement éliminée, il n’y aura jamais de véritables progrès.


- Kinley Penjor -
Boulanger au Bhoutan

« Je veux dire aux dirigeants du monde de soutenir les jeunes. »




Son rêve? Études, formations et un bon emploi pour tous.

À le voir façonner si minutieusement des pâtisseries sur sa plaque de cuisson, on pourrait croire que les projets et les espoirs de Kinley tiennent dans la pièce qui l’entoure. 

Loin de là: il a pleinement conscience des défis qui attendent le système alimentaire dont il est l’un des maillons et du rôle qu’il peut jouer pour faire avancer les choses.

Bien sûr, ses inquiétudes portent en partie sur la boulangerie. Comme rien n’est automatisé, il n’est pas facile de faire face à la demande. Parallèlement, il a du mal à se procurer certains ingrédients: en raison des changements climatiques, les récoltes des exploitants agricoles auprès desquels il se fournit ne sont pas suffisantes.

Il le sait: les entreprises comme la sienne jouent un rôle majeur en vue de garantir un revenu régulier aux exploitants. Pour lui, mieux équiper sa boulangerie, c’est augmenter durablement la production et contribuer à un cercle vertueux.

Kinley a pu améliorer ses compétences et il en est très heureux.

À l’avenir, il souhaite que d’autres se voient offrir les mêmes chances que lui.



- Denise Cardoso -
 Présidente d'une coopérative d'agriculture familiale au Brésil

« Rendre notre région viable, c'est un vrai défi. Les gens ne croient pas que c'est possible. Pourtant, petit à petit, nous rendons cela possible. »

Sa solution? S’organiser en coopératives.

Fille d’agriculteurs pratiquant une agriculture familiale, Denise a grandi dans les traditions séculaires du sertão, région semi-aride du Nord-Est brésilien

Elle a vu la modernisation arriver et menacer de laisser pour compte sa collectivité. Mais elle et ses voisins le savent: les traditions que l’on considère souvent comme des vestiges du passé sont la clé de l’avenir.

Aujourd’hui, Denise est la présidente d’une coopérative qui réunit plus de 270 exploitants pratiquant l’agriculture familiale, qui cherchent à transformer leurs moyens d’existence en faisant connaître les spécialités locales. 

C’est notamment le cas de l’umbú: ce petit fruit était pratiquement inconnu en dehors du sertão. Toutefois, grâce à un nouveau site de transformation, les confitures, gelées et autres jus d’umbú que les familles confectionnent depuis des générations ont fait leur apparition dans les rayons des magasins de tout le pays.

Denise sait qu’il ne faut pas se reposer sur ses lauriers: elle cherche constamment à forger de nouveaux partenariats.

Elle espère que de nouveaux investissements dans l’agriculture familiale permettront à des collectivités comme la sienne de continuer de produire efficacement.

Pour elle, renforcer l’agriculture familiale, notamment par l’organisation en coopératives, est la clé d’un avenir plus équitable pour les agriculteurs et agricultrices du monde entier.

Plus de 700 millions de personnes vivent encore dans l’extrême pauvreté. Des systèmes alimentaires durables sont aussi un outil de lutte contre la pauvreté: ils créent des emplois de qualité, améliorent la disponibilité des produits alimentaires et aident les communautés à prospérer.

Fin 2020, la planète comptait jusqu’à 811 millions de personnes sous-alimentées. Résoudre durablement le problème de la faim exige de repenser nos systèmes alimentaires pour les rendre plus durables, plus productifs et plus résilients.

Les femmes produisent la moitié des denrées alimentaires dans le monde, et jusqu’à 60 à 80% dans la plupart des pays en développement. Des systèmes alimentaires inclusifs peuvent contribuer à l’avancement des femmes et à la consolidation de leurs moyens d’existence partout sur la planète.

L’agriculture est le premier pourvoyeur d’emplois dans le monde, procurant des moyens d’existence à 40% de la population mondiale. Des systèmes alimentaires durables favorisent la création d’emplois décents et de meilleurs revenus pour des milliards d’hommes et de femmes.

Les populations rurales sont au cœur de systèmes alimentaires durables. Dans les zones les plus fragiles et les plus reculées de la planète, leurs activités génèrent des moyens d’existence, favorisent la prospérité, et créent des emplois et des perspectives – en d’autre termes, établissent les fondements de la paix.